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Tournoi des 6 Nations - Jonathan Danty : "Tout le monde nous dit que c’est un match de légende, on finit par y croire"

Par Arnaud Beurdeley
Publié le
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Au lendemain de ce succès historique à Twickenham, Jonathan Danty a accepté de raconter son émotion et les sensations vécues durant cette rencontre qui restera longtemps dans les annales du rugby français. Le trois-quarts centre tricolore, absent lors des trois premiers matchs et dont le retour s’est révélé précieux notamment dans le jeu au sol, avoue aussi avoir eu peur de rater l’intégralité de la compétition.

Si un jour, on vous avait dit que vous gagneriez à Twickenham en inscrivant plus de cinquante points, l’auriez-vous cru ?

Jamais. À tel point que je ne me suis jamais posé la question. Gagner à Twickenham, c’est déjà énorme. Mais l’emporter en inscrivant plus de cinquante points, c’est incroyable. Évidemment, on joue pour gagner tous nos matchs, mais le faire de cette façon, c’est difficile à prévoir. Je crois que nous nous étions vraiment bien préparés, c’est aussi ce qui rend cette victoire très belle. Mais il nous reste ce dernier match samedi contre le pays de Galles pour bien finir le Tournoi.

Les Bleus atomisent l'Angleterre à Twickenham !!!#ANGFRA #XVdeFrance
Le film du match> https://t.co/67zupf1z8K pic.twitter.com/YmwHu9Dveq

— RUGBYRAMA (@RugbyramaFR) March 11, 2023

Avez-vous conscience que ce match restera dans les annales du rugby français ?

Hier soir, nous n’en avions pas conscience. Mais tout le monde ne nous parle que de ça, du fait que c’est un match de légende. Forcément, on finit par y croire. Et puis, j’ai revu quelques images ce matin (dimanche). Il y a quand même eu quelques actions de très grande classe, quelques beaux mouvements. Sans parler de la maîtrise que nous avons pu afficher. On savait que l’équipe de France n’avait pas gagné à Twickenham depuis un certain nombre d’années (depuis 2005 dans le Tournoi des 6 Nations, N.D.L.R.). Après, j’ai tendance à très vite passer à la suite.

Avez-vous conscience d’être entré dans l’histoire ?

À titre individuel, non. Mais collectivement, on se souviendra longtemps de cette rencontre.

Votre émotion a-t-elle été à la hauteur de l’exploit ?

La chance que j’ai eue, c’est que je suis sorti dix minutes avant la fin de la rencontre. J’ai pu profiter à cet instant de l’ambiance dans le stade et assister à ce dernier essai magnifique de Damian (Penaud). J’ai bien ressenti l’intensité de cette fin de match et le plaisir que nous avons réussi à procurer aux supporters. Il y avait beaucoup d’excitation autour de moi mais je savais aussi qu’il restait encore un match. Ce dernier rendez-vous, nous ne voulons pas le rater. Au contraire. Il fait partie de la construction de notre équipe dans la perspective de notre objectif principal : la Coupe du monde. D’ailleurs, si nous parvenons à conserver ce niveau-là, on pourra nourrir quelques ambitions pour soulever le trophée.

Cette large victoire est-elle une revanche par rapport à une rencontre où vous auriez souffert contre cette équipe anglaise ?

Je n’ai pas joué si souvent que ça contre l’Angleterre, mais j’avais été très déçu de notre défaite en finale de la Coupe d’automne des Nations à Twickenham (22-19). Une défaite après prolongation, un match que nous aurions dû gagner. Et je l’avais un peu en travers de la gorge. Mais je ne me suis pas nourri de ça pour préparer ce match. Ce succès, c’est une autre étape, une de plus pour l’histoire de notre équipe.

Avez-vous le sentiment que l’essai de Charles Ollivon juste avant la pause est celui qui vous permet de tuer définitivement le match ?

Non, pas du tout. C’est vrai que cet essai nous permet de rentrer au vestiaire avec 24 points d’avance. Mais je crois plutôt que celui inscrit juste après l’essai anglais par Thibaud (Flament) en début de seconde période met définitivement la tête des Anglais sous l’eau. On ne leur a pas laissé le temps d’espérer. C’est le moment clé de la rencontre.

Danty et Moefana après la victoire écrasante des Bleus sur la pelouse de Twickenham.
Danty et Moefana après la victoire écrasante des Bleus sur la pelouse de Twickenham.

Cette rencontre, le XV de France se l’est rendue facile notamment en remportant la bataille du jeu au sol. Or, sur les premières rencontres, ce ne fut pas le cas. En quoi votre retour a-t-il permis d’être performant dans ce secteur de jeu ?

Sur les premiers matchs, j’ai été très surpris que nous soyons autant sanctionnés et aussi peu récompensés sur ce secteur de jeu. Après, ce n’est pas quelque chose que je travaille tout particulièrement. C’est surtout de la lecture de jeu. Quand faut-il mettre les mains sur le ballon ? Quand est-il préférable de "contre-rucker" ? Quand faut-il ne pas disputer le ruck ? À l’expérience, j’arrive aussi à jauger la façon dont les arbitres surveillent cette zone de combat au sol. Mais c’est vrai qu’un ruck qui dure trois secondes, c’est très différent d’un ruck qui dure six ou sept secondes. En partant de ce constat, ma première idée, c’est d’offrir plus de temps à l’équipe pour se replacer.

Justement, comment avez-vous vécu ces trois premiers matchs lorsque vous étiez blessé ?

Comme tout le monde, j’ai constaté que nous avions parfois eu du mal à retrouver notre jeu. Mais c’est assez délicat pour moi de commenter des rencontres auxquelles je n’ai pas pu participer.

À l’instant de votre blessure, avez-vous eu peur de rater l’intégralité du Tournoi ?

J’ai eu même très peur. Dès le départ, je me suis dit que si je ne parvenais pas à revenir dans le Tournoi, ce serait très compliqué de prétendre à une sélection pour le Mondial. Je peux l’avouer : j’ai eu quelques sueurs froides et j’ai pas mal cogité.

À quel moment avez-vous été rassuré ?

Le staff a été très à l’écoute de mes inquiétudes. Fabien (Galthié) est toujours resté en contact avec moi. Dès que j’avais de nouvelles informations, je lui transmettais. Nous avons toujours beaucoup échangé. Les coachs m’ont toujours dit qu’ils comptaient sur moi. Ça m’a fait vraiment beaucoup de bien. Mais bon…

Oui ?

Quand on n’est pas sur le terrain, il y a potentiellement le risque qu’un autre joueur se révèle et prenne le maillot. C’est le jeu de la concurrence et c’est tout à fait normal. Au fond de moi, j’avais tout de même cette inquiétude.

Fabien Galthié a rapporté jeudi dernier en conférence de presse un de vos échanges. Pourquoi lui avoir dit que vous étiez chaud pour le "crunch" ?

En fait, j’essaie d’être le plus transparent possible avec le staff. Lorsque je suis arrivé à Marcoussis, j’avais dit à Fabien que ma reprise contre Castres s’était plutôt bien passée, mais que j’avais été catastrophique contre Brive (rires). Du coup, avant d’annoncer la composition de l’équipe, il m’a demandé si j’étais prêt et si j’avais quelque chose à dire à la presse. En rigolant, je lui ai répondu : "Dis-leur que je suis chaud." Seulement, je ne pensais pas qu’il allait vraiment le faire. Quand j’ai lu les différents articles, je me suis dit : "oh putain, il ne faut pas que je passe à travers de ce match, sinon je vais passer pour un con."

Fabien Galthié a d’ailleurs souligné votre honnêteté vis-à-vis de vos performances. Est-ce facile d’avoir du recul sur soi ?

J’essaie d’être le plus lucide possible. Plus jeune, j’ai eu pas mal de pépins, ce qui m’a freiné dans ma progression vers le plus haut niveau. J’ai parfois voulu revenir trop vite. Or, aujourd’hui, si je ne me sens pas à 100 %, je préfère ne pas être sur le terrain. D’abord, pour ne pas me pénaliser personnellement. Ensuite, pour ne pas être un frein pour l’équipe. Un joueur à 80 %, c’est un handicap pour l’équipe. Et à ce niveau de compétition, on ne peut pas se permettre de mentir, ni de tricher.

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