L'édito du lundi : une part de légende

Par Emmanuel MASSICARD
  • Damian Penaud et les Français se sont offert un match de légende à Twickenham.
    Damian Penaud et les Français se sont offert un match de légende à Twickenham. Icon Sport - Icon Sport
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Que les choses soient bien claires, posées d’entrée de jeu et aussi promptement que le XV de France a inscrit son premier essai, samedi à Twickenham, par l’intermédiaire de Thomas Ramos : les Bleus n’ont pas battu la plus grande des équipes d’Angleterre. Au contraire même, ce pourrait être l’une des plus sinistres qu’il nous fut donné à voir. Transparente et dégingandée. Sans âme ni férocité. Pire encore, sans cervelle(s). Tout simplement indigente.

S’ils ne sont donc pas encore champions du monde, les hommes de Galthié sont au moins les nouveaux rois d’Angleterre. Et, surtout, auteurs d’une partition qui, soyez en sûrs, entrera très vite dans la légende du rugby français. Après le grand combat de 1958 en Afrique du Sud, la force unique du Grand Chelem 1977, le 14 juillet 1979 d’Auckland, les demi-finales de Coupe du monde 1987 et 1999 sans oublier le quart de 2007 ou le 51-0 infligé aux Gallois, à Wembley en 1998… Ce 11 mars 2023 va rejoindre notre panthéon.

Quel pied ! Quelles émotions ! Et, surtout, quelle promesse pour demain ! Même si, revenons-y gaiement, la faiblesse anglaise doit nous inciter à relativiser, n’oublions pas le record et l’ampleur de la performance. Souvenons-nous qu’il y a un mois, les Bleus de la génération Dupont ont perdu en Irlande leur statut d’invincibles et ce nom de guerre qu’on leur avait collé au paletot. Depuis l’automne, ils apparaissaient engoncés dans des certitudes qui s’étiolaient paradoxalement au fil des matchs gagnés. Ces dernières semaines, ils semblaient encore plus fatigués, manquant de "peps" et d’explosivité. Peut-être même d’envie, sur certains points.

Le rebond est là, avec une indéniable montée en puissance au plan physique et une intensité retrouvée… En faisant le choix de raviver la concurrence à certains postes, Fabien Galthié a certainement piqué ses joueurs. Son pari fut donc gagnant.

Surtout, ne nous excusons pas d’avoir à savourer ce bonheur. Car les Bleus ont clairement marché sur la lune pour s’imposer dans le Temple du rugby. Ils l’ont fait avec la manière, en laissant place à l’inspiration et au talent. Mais pas seulement, et c’est ce qu’il faut apprécier à juste valeur : au-delà des sept essais inscrits et de ce dernier bijou porté par Penaud au bout d’un mouvement joué en première main, retenons surtout la maîtrise affichée par ce XV de France qui n’a jamais surjoué face à un adversaire faisant peine à voir. Jusqu’au bout, et c’est le plus remarquable, il a récité sa mélodie sans sortir du cadre. Et fit preuve d’un pragmatisme qui s’était éloigné ces derniers temps.

Le temps d’un match aussi prestigieux qu’un titre, nous avons ainsi retrouvé les Bleus de 2022. Ces "irrésistibles" accrochés à la victoire, froids et cliniques. Parfois cyniques. Puissent-ils durer à nouveau, le plus longtemps possible…

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