L'édito : dessine-moi un beau rugby

Par Léo FAURE
  • On vous pose ici la question : « bien jouer, c’est quoi ? ».
    On vous pose ici la question : « bien jouer, c’est quoi ? ». SUSA / Icon Sport - SUSA / Icon Sport
Publié le
Partager :

L'édito du vendredi par Léo Faure... On vous pose ici la question : « bien jouer, c’est quoi ? ». C’est assez enfantin, comme question. Un peu comme cette requête que le Petit Prince de Saint-Exupéry avait formulée à son créateur, sorte de pansement Pat’Patrouille sur l’universel : « s’il te plaît, dessine-moi un mouton ». Le mouton peut ici être remplacé par tout ce que bon vous semble. Vraiment tout, et même n’importe quoi. On essaye ? « S’il te plaît, dessine-moi un beau rugby. »

Voilà qui ouvre le spectre des possibles à tout, et encore n’importe quoi. Un beau rugby, c’est quoi ? Chacun a sa vérité. Une action de 80 mètres qui balaye le terrain de gauche à droite et de bas en haut ? Des passes, encore des passes, sautées, au contact, dans la défense, dans la profondeur et au cordeau, à la main et au pied ? Cela plaît, c’est sûr. Pourtant, dites-vous que cela ne plaît pas à tout le monde. Certainement pas dans un hexagone qui vénère la mêlée fermée comme une divination.

Moins collectif, tout aussi beau : l’exploit personnel ? Un joueur qui seul, sur son aile ou au cœur de la meute, élimine un, deux, trois défenseurs, de crochets ou de charges, et s’en va porter seul le ballon en cette terre d’en-but fantasmée.

Plus collectif, tout aussi beau : un groupé-pénétrant de vingt mètres, si possible au pas de course ? Pas une fieffée passe à humer mais un effort de cohésion collective qui justifie bien que la foule se lève.

Nous voilà à tourner en rond. Comme aux plus belles heures des retrouvailles Ugo Mola et Christophe Urios. Deux ennemis même pas intimes, l’un plaidant la liberté du mouvement, l’autre la beauté du combat. Figurez-vous que les deux ont raison. Et que les deux, assis sans démordre sur ces croyances si opposées, ont décroché par la force de leurs convictions les plus belles lettres de noblesse de notre sport. On peut gagner de tant de manières.

Un beau rugby, ce serait donc un rugby qui gagne ? Toujours pas si simple. Et d’ailleurs, c’est quoi, un rugby qui gagne ? L’ADN toulousain de « la passe de plus », d’instinct et de risques se fracasse dès lors qu’il croise la route de l’hyper-programmation du Leinster. En Coupe d’Europe, les affrontements entre les deux super-puissances continentales ont trop souvent tourné à l’avantage des Dublinois. Ces mêmes Irlandais, réputés invincibles, ne savent pourtant que faire de la toute-puissance rochelaise, qui les a terrassés deux fois ces dernières années, dans les moments qui comptent. Et La Rochelle, si musculeuse et droit devant, ne trouve pas la clé de l’outre-vitesse toulousaine.

On tourne en rond, et cette fois pour de vrai. Le Leinster bat Toulouse, qui bat La Rochelle, qui bat le Leinster. Au moment où se décident les titres, il faut pourtant une réponse. C’est ce que nous promet la campagne des phases finales de Champions Cup qui arrivent enfin. Un grand rassemblement des trois super-puissances (La Rochelle, Toulouse et le Leinster) dans lequel les Saracens et les colosses sud-africains tenteront de mettre un énorme coup de latte. Question de suprématie, la route vers le sacre paraît bien indécise.

Tout le monde pense avoir la recette ultime mais personne ne l’a réellement. Le plus important est finalement la croyance. La certitude du « beau » dans tout ce que l’on entreprend. Le mouton de Saint-Exupéry pouvait bien être dessiné dans une caisse, invisible et laissé à la seule portée de l’imaginaire, le Petit Prince le trouva sacrément beau.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?

Les commentaires (1)
jmbegue Il y a 1 année Le 31/03/2023 à 17:30

Certains diront que le beau rugby c'est celui qui gagne.
Personnellement, il y a des rugby qui gagnent et qui me font quitter mon siège pour aller prendre un bon bouquin.
Le rugby des Rapetous par exemple me donnait l'envie de ne plus perdre mon temps devant un match de rugby.