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Manae Feleu, l’héritière de Céline Ferer

Par Simon VALZER
  • Manae Feleu va vivre un match particulier ce dimanche. L'Amazone de Grenoble va évoluer au stade des Alpes et devant sa famille venue spécialement de Wallis-et-Futuna.
    Manae Feleu va vivre un match particulier ce dimanche. L'Amazone de Grenoble va évoluer au stade des Alpes et devant sa famille venue spécialement de Wallis-et-Futuna. Icon Sport - Baptiste Fernandez
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Excellente depuis le début du Tournoi des 6 Nations, la jeune deuxième ligne grenobloise Manae Feleu semble avoir pris une nouvelle dimension. Un scénario qu’avait imaginé sa prédecesseuse Céline Ferer, qui raconte son héritière.

Céline Ferer nous l’avait confié dans la nuit qui avait suivi le match pour la troisième place remporté haut la main par les Bleues face au Canada à l’Eden Park d’Auckland. Au cœur de la traditionnelle bringue de fin de compétition, la deuxième ligne basque nous avait dit ceci, en pointant la jeune Manae Feleu : "Elle, c’est ma pouliche. Elle a un grand potentiel." Plus tôt dans la soirée, on avait vu les deux joueuses échanger longuement. Une discussion visiblement émouvante, au vu des grosses larmes qui avaient ruisselé le long des joues de la joueuse originaire de Futuna : "J’étais très triste ce soir-là, confirme Feleu, Pas seulement pour moi mais pour le groupe. C’était une fille qui amenait beaucoup de bonne humeur, de liant, avec qui on pouvait parler de tout. Elle était très importante dans le groupe." La Grenobloise savait aussi qu’elle vivait là ses derniers instants avec celle qui, du haut de ses 60 sélections, l’avait prise sous son aile.

Quelques mois plus tard, on a donc demandé à Céline Ferer comment cette relation était née : "Quand elle est arrivée, je la trouvais déjà intéressante dans la dimension athlétique, avec un profil deuxième/troisième ligne. Et puis humainement, on a accroché direct. Elle est ouverte d’esprit, elle est gentille, c’est vraiment une bonne gosse. Elle a été mon coup de cœur chez les petites jeunes et j’ai rapidement dit aux filles qu’elle était ma pouliche ! Sur le terrain, je me dépouillais pour qu’elle entre plus vite. J’ai toujours cru en elle, même si elle n’a pas eu beaucoup de temps de jeu pendant le Mondial. Je lui ai donné mon dernier maillot de match, celui de la troisième place."

Feleu : "Pendant les hymnes, je pensais à Céline"

Maillot frappé du numéro 4 et que, quelques mois plus tard, l’on a retrouvé sur les épaules de Manae Feleu lors du premier match du Tournoi à Parme contre l’Italie et qui explique en grande partie l’émotion qui avait submergé Manae Feleu pendant les hymnes : "Ça m’a fait quelque chose de porter son maillot, raconte la Grenobloise. C’est en grande partie pour cela que je pleurais pendant les hymnes en Italie. Je pensais à Céline. Elle m’a beaucoup appris et j’avais à cœur de le porter aussi bien qu’elle." Un maillot qu’elle a reporté la semaine suivante, en Irlande, et auquel on peut dire qu’elle a fait honneur sur ces deux premières sorties.

Manae Feleu prend de l'ampleur dans le groupe France
Manae Feleu prend de l'ampleur dans le groupe France Icon Sport - Baptiste Fernandez

À Parme, l’Iséroise a été l’avant qui a gagné le plus de mètres balle en main : 59 mètres, soit deux fois plus que la troisième ligne centre Charlotte Escudero avec le même nombre de munitions. Elle s’est aussi illustrée en défense, avec 14 plaquages effectués mais trois manqués. Elle a toutefois rectifié le tir la semaine suivante, à Cork, en infligeant 19 plaquages aux Irlandaises sans en manquer un seul. Et encore une fois, on l’a vu porter le ballon et avancer, avec 12 ballons, 56 mètres gagnés et surtout sept plaquages cassés, meilleur score chez les Bleues avec Gabrielle Vernier. Elle a aussi fait jouer ses coéquipières, avec trois passes et deux offloads. Bref, une prestation pleine qui justifie pleinement son statut de titulaire. Lequel n’a strictement rien à voir avec celui qu’elle avait à la dernière Coupe du monde. Figurant parmi les (très) jeunes joueuses appelées, et qui n’avaient qu’une très faible expérience internationale, Manae Feleu avait fait deux feuilles de match (Afrique du Sud et Fidji) pour 43 minutes au total passées sur les pelouses néo-zélandaises.

Ferer : "Le Mondial a décuplé son appétit"

Franchement, on n’attendait pas la jeune Futunienne à un tel niveau dans ce début de Tournoi 2023. Pas aussi rapidement, en tout cas. Mais force est de constater que l’épisode Coupe du monde l’a tranformée, même si elle n’y a que peu joué : "Je n’ai pas travaillé davantage à mon retour du Mondial, nous confiait l’intéressée, j’ai toujours travaillé fort mais je pense que cela commence à porter ses fruits. En revanche, la Coupe du monde m’a fait beaucoup grandir niveau rugby, cela m’a donné beaucoup de confiance. Je comprends beaucoup plus de choses sur le terrain. Je l’ai senti à mon retour en club aussi. Je suis plus sereine dans mon match, j’analyse mieux les choses notamment sur le plan tactique ou dans la gestion des émotions. Avant, je faisais au pif." Céline Ferer confirme : "Je ne suis pas étonnée de son début de Tournoi. Elle a beaucoup appris pendant le Mondial, même si elle a dû ronger son frein. Cela a décuplé son appétit. Après, je dois reconnaître que ne m’attendait pas à la voir autant sur les deux premiers matchs : elle a mis des carreaux, beaucoup avancé balle en main… Tout le monde l’a vu. J’ai même reçu des messages de mon père qui m’a dit : "Elle est pas mal ta pouliche !""

Céline Ferer, ici balle en mains, peut quitter l’esprit libre son poste de deuxième ligne du XV de France féminin. Sa successeure au poste, Manae Feleu (en médaillon) a déjà toutes les qualités requises pour assurer la suite
Céline Ferer, ici balle en mains, peut quitter l’esprit libre son poste de deuxième ligne du XV de France féminin. Sa successeure au poste, Manae Feleu (en médaillon) a déjà toutes les qualités requises pour assurer la suite Icon Sport - SUSA

Difficile de donner tort à "Grande", qui apprécie en plus la polyvalence de son héritière : "Je la trouve assez complète : on ne peut pas l’enfermer dans une case car elle sait tout faire. C’est une guerrière en défense, une grosse porteuse, une bonne sauteuse…" Et si l’on regarde plus loin, ne pourrait-on pas penser qu’une fois qu’elle aura un peu plus de bouteille, Manae Feleu ne ferait pas une belle candidate au poste de capitaine de l’équipe de France pour la prochaine Coupe du monde en 2025 ? Ferer abonde : "Avec d’autres filles, on s’est dit qu’elle coche toutes les cases pour le capitanat : sportivement elle assure, elle a de la prestance, elle est bilingue, elle a une belle gueule… Je trouve qu’elle donne une belle image du rugby français." Un seul regret pour l’ex-Toulousaine, tout de même : "J’aurais juste aimé jouer davantage avec elle." Qu’importe. "Grande" a passé le flambeau. Et elle est heureuse de l’avoir fait : " C’est une fierté de passer la main à une fille comme ça."

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Les commentaires (1)
fojema48 Il y a 1 année Le 26/04/2023 à 06:38

Tant mieux, on en redemande...!