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Lapasset, l'homme qui s'ouvrit au professionnalisme : 1995, le grand saut

Par Jerome Prevot
  • Bernard Lapasset prend la pose avec la Coupe du monde.
    Bernard Lapasset prend la pose avec la Coupe du monde. Xavier Cailhol / Icon Sport - Xavier Cailhol / Icon Sport
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Bernard Lapasset a fait partie de ceux qui ont décidé du passage au professionnalisme, même s’il n’appréciait pas trop les conséquences.

Bernard Lapasset restera comme le président français qui a vécu le passage au professionnalisme en 1995. Il l’a vécu comme gestionnaire franco-français, mais aussi comme décisionnaire au sein de l’IRB. Il faisait partie des caciques qui ont voté la mesure fatale (sous la pression de certains projets pirates il est vrai).

Ce vote historique, Lapasset le préparait depuis deux mois au sein d’une commission spéciale avec le Gallois Vernon Pugh (décédé en 2003), l’Écossais Fred McLeod et le Néo-Zélandais Rob Fisher. Les quatre hommes avaient sacrifié leur été à réunir des documents, à échanger des lettres, des fax et des e-mails. "Vernon Pugh, juriste de profession, avait tout synthétisé dans un rapport magnifique de clarté."

Ce 26 août, les débats duraient depuis deux jours dans un hôtel parisien du Boulevard Haussman dans une atmosphère lourde évidemment. Si les 21 caciques franchissaient le pas, rien ne serait plus comme avant. Lapasset avait ajouté : "Ça restera comme l’un des moments les plus forts de ma vie de dirigeant. Tout le jeu consistait à faire voter les membres à l’unanimité, point par point. En plus, je ne voulais pas de vote secret. Chacun devait s’exprimer à main levée, c’était trop important. Celui qui aurait voté "non" aurait dû dire pourquoi. Quand je sentais que quelqu’un n’allait pas être d’accord, je m’abstenais de passer au vote et je reprenais le débat."

Il n’aimait pas le professionnalisme pur et dur

Mais une fois le Rubicon franchi, il fallut transposer la mesure dans l’Hexagone. Ce fut peut-être le passage le plus délicat du mandat de Bernard Lapasset car au fond de lui, il ne croyait pas au professionnalisme pur et dur. Aux présidents, il opposait une idée de franchises provinciales.

Sur le moment, il déclara : "Pas de championnat pro en France…" Et d’argumenter quelques années plus tard : "Je voulais un rugby "open" car nous n’étions pas prêts tout de suite, en France, pour une compétition professionnelle. Il fallait prendre le temps de se former. D’ailleurs, c’est la FFR qui a continué à prendre en charge l’Élite à travers une commission spéciale, la CNRE (commission nationale de rugby d’élite, ancêtre de la Ligue), même si des clubs professionnels y participaient. Je ne voulais pas qu’une poignée de clubs écrase tout."

Jacky Laurans se souvient : "Oui, nous avons été critiqués, c’était facile. Mais Bernard était conscient des moyens fédéraux qui étaient limités, comme ceux de nos clubs d’ailleurs. Mais nous avons signé les premières conventions, les premiers passages entre monde pro et fédération, dont il reste des traces aujourd’hui. J’ajoute que nos rapports avec Serge Blanco, premier président de la LNR, étaient bons."

Mais c’est vrai, il y eut des tensions entre Bernard Lapasset et les présidents "élitistes" (Bouscatel, Revol…) et leur leader Séraphin Berthier. C’était une lutte de pouvoir pour contrôler le sommet de la pyramide, la vitrine du rugby. On lui prêtait ce sentiment : "Vous avez voulu votre indépendance, OK. Si ça échoue, ce sera votre faute." On a souvent dit qu’avec machiavélisme, Bernard Lapasset souhaitait depuis le départ l’échec du rugby professionnel des clubs, pour pouvoir mieux placer l’élite sous sa coupe. Ça ne s’est pas passé comme ça. Alain Doucet évoque : "Nous avons vécu des réunions épiques. Bernard Lapasset se battait pour les intérêts de la FFR qui devait contrôler tout le rugby jusqu’à son élite. Il s’est battu pour l’article 9, par exemple, pour protéger les équipes nationales. Sur bien des sujets, d’autres se seraient couchés."

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