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200 ans de légende (32/52) : l’année bénie de Jacques Fouroux

Par Jérôme Prévot
  • 200 ans de légende (32/52).
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Publié le Mis à jour
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Rarement un international aura été aussi critiqué que Jacques Fouroux, même en 1977 alors qu’il conduisit la France à son second Grand Chelem.

Il avait trente ans. Jacques Fouroux aura marqué d’une profonde empreinte cette année 1977 : il conduisit au grand chelem le XV de France le plus implacable de l’histoire, avant de claquer la porte de la sélection avec fracas. Entre les deux, un entretien au lance-flammes, moment de télé d’anthologie au micro de Pierre Salviac. On ne peut pas décemment retracer deux siècles de rugby d’un point de vue français sans se remémorer la carrière de ce petit homme, gigantesque par son charisme. Jacques Fouroux était un demi de mêlée décrié, parfois moqué pour son inélégance, sa passe pas toujours bien assurée. Il ne la faisait que d’un côté d’ailleurs, au mépris des exigences de la fluidité du jeu. Il n’était ni particulièrement explosif ni spécialement rapide. Il n’eut même pas la chance de jouer dans un grand club pour se faire remarquer : Auch, La Voulte et Cognac n’étaient pas exactement des tremplins pour le très haut niveau. La preuve, « JF » a très peu connu l’ivresse des phases finales du championnat, jamais il n’a dépassé le stade des quarts de finale (une seule fois, en 1973 avec La Voulte). Sa carrière fut tout entière placée sous le signe du conflit et de la remise en cause. « Vous avez fait plus de mal au rugby que de bien ! On n’a jamais vu un capitaine se faire conspuer autant que vous à l’appel de votre nom ! Vous êtes un gagne-petit ! Vous avez une passe de maçon ! Vous ne plaisez pas ! Que faites-vous dans le XV de France ? » Voilà les questions qu’il devait affronter aux heures de grande écoute, dans le cadre de Stade 2.
Il suffit de faire un test. Demandez à ceux qui l’ont vu jouer de parler des qualités de Fouroux, on vous répondra après un moment d’hésitation avec des arguments… non-sportifs : « Courageux, dur au mal, meneur d’hommes… » À se demander comment le natif d’Auch a pu fouler les mêmes pelouses que Gareth Edwards, son alter ego gallois, si technique, si physique, si inspiré…

Chaussettes baissées, verbe haut

C’est donc ce « petit chose » aux chaussettes baissées qui mena le XV de France au grand chelem avec les quinze mêmes titulaires et sans encaisser d’essai. Un « Petit Caporal » derrière un pack de fer, qu’il cornaquait à sa guise avec des mots, encore des mots, toujours des mots. Et ses formules, toujours des formules, encore des formules de fin lettré lui qui n’avait que le certificat d’études. C’était un capitaine, oui, mais à l’ancienne, c’est-à-dire avec autant de pouvoir que les entraîneurs, très peu cités par les médias d’ailleurs (Jean Desclaux et Jean Piqué). Après le match final en Irlande (15-6), il a refusé d’être porté en triomphe et dans nos colonnes, le voilà obligé encore de se justifier : « Mon style n’est pas élégant, on discute la qualité de mes passes, mais calcule-t-on le pourcentage des ballons pourris derrière la mêlée adverse par mon pressing défensif ? »
Mais c’est le même homme couronné à la fin de l’hiver qui dès la fin de l’automne, prit soudain sa retraite internationale après un succès à Clermont-Ferrand face à la Roumanie (9-6).

La rumeur avait couru juste avant la rencontre, Fouroux s’était exprimé devant ses partenaires : « Nous avions bâti une maison où l’on se sentait bien. Mais j’ai l’impression qu’on a voulu la démolir. Alors, j’ai décidé de jouer mon dernier match sous le maillot tricolore. Après, je me retire. » Avant d’éclater en sanglots. Il confirme après le match dans le vestiaire après une discussion orageuse avec Élie Pébeyre, le sélectionneur qui ne l’aimait pas : « Je sais que vous voulez me virer de l’équipe. Je ne vous donnerai pas ce plaisir. Je m’en vais avant que vous me mettiez dehors ! » Puis à l’attention de la presse, ce sera cette diatribe extraordinaire : « Merci à tous, quant aux journalistes qui ont si souvent écrit mon nom avec des plumes trempées dans le vitriol, s’il vous en reste encore un peu au fond de vos flacons, buvez un coup à ma santé ! »
Il faut bien comprendre que l’année 77 de Fouroux fut ponctuée d’un grand chelem et d’une victoire sur les All Blacks. En chiffres, ça donne sept victoires, un nul (en Argentine) et une seule défaite face à la Nouvelle-Zélande. C’est ainsi que Fouroux a tiré sa révérence avec une aura de martyr qu’il n’a pas voulu, mais dont il aura su jouer avec maestria.

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Les commentaires (1)
CasimirLeYeti Il y a 9 mois Le 11/08/2023 à 03:03

Le temps atténue les douleurs mais vous ne nous ferez pas croire que M. Fouroux était un grand joueur ou un grand entraîneur ; il a usé et abusé de vilenies tout au long de sa carrière pour écarter les meilleurs à son poste ou ailleurs. Sa carrière sonne comme une marche funèbre pour des phénomènes qui auraient pu faire dès les années 70 ou 80, de la France, une des Nations phares du Rugby : Richard Astre, Max Barrau, Jérome Gallion pour les demis de mêlée, José Porcel, Pierre Lacans, Manu Diaz, Bernard Delbreil, Denis Charvet... Un dernier exemple ? Daniel Dubroca, pilier de métier à Agen, adroit et rapide pour ce poste, transformé en talonneur et formé à ce poste, par jean-louis Dupont, son collègue titulaire du poste à... Agen !