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XV de France - Paul Boudehent : "C’est flatteur d’être comparé à Anthony Jelonch"

Par Propos recueillis par Vincent Bissonnet
  • Paul Boudehent avec le XV de France
    Paul Boudehent avec le XV de France - Patrick Derewiany
Publié le
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Sensation de l’été, le Rochelais de 23 ans nous parle de ses premiers pas en Bleu, de son parcours à rebondissements, de sa foi ou encore de ses ambitions pour la suite. Avec une sincérité rafraîchissante.

À vos yeux, quelle valeur a la victoire de samedi face à l’écosse ?

C’est plus de l’ordre du symbolique. Même s’il n’y avait pas d’enjeu, ça restera ma première victoire avec l’équipe de France. C’est ce que je retiendrai. D’autant plus qu’il y avait ma famille, mes parents, mon oncle, ma tante, mon frère et sa femme dans les tribunes. C’était super de partager ce moment avec eux. Et il y a eu ma première Marseillaise en France, aussi.

Comment l’avez-vous vécue ?

C’était super même si c’était dur de gérer toutes les émotions. J’avais envie de la chanter à pleins poumons mais je savais que si je faisais ça, je risquais de me laisser dépasser par mes émotions. Et je ne le voulais pas. Il fallait que je contrôle mon enthousiasme pour la suite.

Vous avez affronté deux fois le même adversaire mais dans des contextes diamétralement opposés…

Exactement. C’était presque plus simple à Édimbourg d’ailleurs car les Écossais nous avaient un peu pris à la légère. Ils devaient considérer que nous étions une équipe B. Pour le coup, le staff nous avait mis dans de bonnes conditions et nous avait demandé de montrer ce que l’on savait faire. Les mecs présents sur ce match avaient tout à gagner, à commencer par leur place. Le contexte était différent à Saint-étienne. Les Écossais n’avaient pas abordé ce match de la même manière. Ils l’avaient très bien préparé, comme on a pu le voir.

N’était-ce pas bizarre de se retrouver soudainement aux côtés des joueurs les plus expérimentés ?

Je ne dirais pas bizarre, non. Je l’ai avant tout pris comme une chance. Ça ne reste que du rugby, vous savez. Puis, dans la semaine, William Servat m’avait donné des conseils pour que j’appréhende au mieux cette deuxième sélection. Il m’a dit que je ne devais pas me laisser endormir par les retours globalement positifs et par ce qui se disait sur moi. Tout ça n’était que des illusions. Je m’étais préparé à répondre présent sur les bases du jeu et les choses simples comme les rucks, les plaquages. Je voulais bien construire ma prestation avant de penser à briller.

Quel bilan tirez-vous de cette deuxième cape ?

Je pense avoir eu une bonne activité mais il y a eu du déchet. Après, je n’ai pas encore revu le match, ce n’est que du ressenti. Mais je sais que, s’il y a eu du positif, j’ai des points à améliorer en défense comme en attaque.

Comment vous êtes-vous senti pendant la préparation ? Est-ce c’est un domaine que vous appréciez ?

Je me suis bien senti même si la coupure d’après-saison a été assez courte, comme pour les dix-huit autres finalistes. Le staff a très bien géré cette partie en individualisant les programmes. De manière générale, j’aime bien la préparation. Il faut dire que la condition physique est un de mes points forts, alors je ne vais pas cracher dessus.

Par le passé, vous avez eu plusieurs sérieuses blessures. Avez-vous changé votre approche ou votre rapport à votre corps ?

Je fais un peu plus attention au quotidien, sur les entraînements. En match, ce n’est pas possible car je me donne toujours à 100 %. Mais avec l’expérience, on sait quand on peut repousser ses limites ou non en dehors des rencontres. Pour le reste, étonnamment, ce qui m’a le plus aidé, c’est que je me fais désormais plaisir sur la bouffe. Avant, je me restreignais sur plein de choses. Je voulais bien faire mais je me posais trop de questions à l’arrivée. J’ai inclus le plaisir dans ma vie de tous les jours. C’est crucial pour que je sois bien dans ma tête. Attention, je ne dis pas que j’étais malheureux avant non plus…

Vous êtes-vous inspiré de Grégory Alldritt en la matière ? C’est un apôtre de la fraîcheur mentale, en l’occurrence…

Oui, Greg est un très bon exemple de ce mode de vie-là… Du plaisir, on peut en trouver partout. Ça peut être de bons moments avec ses potes, en famille, une bonne bouffe, une partie de pêches avec les copains… Le fait de trouver différents plaisirs hors rugby m’aide quand il faut se replonger pleinement dedans.

D’où vous vient votre force physique ?

Bonne question. Disons qu’avec Pierre (son frère, N.D.L.R.), on a eu une très bonne génétique. On peut remercier nos parents, d’ailleurs. Ça ne nous est pas pour autant tombé tout cuit entre les mains et nous avons beaucoup travaillé pour développer nos qualités. Mais on peut s’estimer chanceux d’avoir eu quelques facilités.

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L’an passé, vous avez eu une opération qui vous a en quelque sorte débarrassé de vos pépins. Pouvez-vous nous en parler ?

C’était un souci à un tendon rotulien. Grâce à une IRM, on a pu traiter cette douleur que je traînais depuis des années. Elle m’embêtait un peu, disons. Ça a été très bien soigné.

Dans la foulée, vous avez réalisé votre meilleure saison en enchaînant les gros matchs jusqu’à être titulaire lors des deux finales. Peut-on parler de déclic ?

Un déclic ? Je ne sais pas si on peut dire ça. Je pense que je pourrai répondre à cette question dans cinq ans. Pour l’heure, c’est trop frais, je n’ai pas assez de recul et ma carrière est courte. Ce qui est sûr, c’est que ça a été une année importante à titre personnel.

À quel moment l’objectif Coupe du monde s’est-il ancré à votre esprit ?

Ça fait un bon bout de temps, figurez-vous (sourire). Je salue d’ailleurs Romain Carmignani. À l’époque où il m’entraînait chez les espoirs, ce devait être en deuxième ou en troisième année, il me faisait souvent des blagues avec France 2023. Il me défiait sur ça même s’il restait un paquet de saisons à faire. C’étaient des petites piques, pour me stimuler. Depuis, ça a toujours été un objectif. Romain a d’ailleurs été un des premiers à m’envoyer un message quand j’ai été appelé.

Avez-vous douté de votre réussite professionnelle avec l’accumulation des blessures ?

J’ai douté, évidemment. Il y a eu des moments où j’étais moins bien, où je me remettais en question. Je me demandais pourquoi il m’arrivait tout ça et est-ce que j’allais réussir à m’en sortir. Je ne suis qu’un homme. Mais j’ai toujours persévéré, j’ai continué de travailler. Dans ces moments-là, le soutien du club m’a beaucoup aidé.

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Vous avez grandi dans une famille catholique pratiquante. Votre foi a-t-elle été un allié dans ces épreuves et l’est-elle encore aujourd’hui ?

Oui, ça a été une force et ça l’est toujours. C’est ce qui me permet de me surpasser. J’entretiens ma foi tous les jours. C’est un peu comme garder le lien avec un ami, il faut lui parler régulièrement, rester en contact… Après, au quotidien, je n’impose rien aux autres. Je suis ouvert à la discussion et je sais que tout le monde a des avis différents sur le sujet.

Revenons au rugby. On a tendance à vous comparer à Anthony Jelonch. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Anthony Jelonch est un très bon joueur, c’est flatteur d’être comparé à lui. Je remercie ceux qui pensent ça. Après, est-ce que c’est flatteur pour lui ? Je ne sais pas (rire)… J’espère en tout cas que j’aurai prochainement la chance de jouer avec lui. Je n’ai pas encore eu cette occasion.

Comment vous définiriez-vous en tant que troisième ligne ? On a l’impression que vous avez toute la panoplie pour le poste…

Je dirais que je suis un troisième ligne qui enchaîne les tâches, en attaque comme en défense. J’essaie d’être le plus complet possible. Je remercie d’ailleurs tous mes entraîneurs, à Angers, à Nantes et en espoirs, qui ont contribué à mon évolution. Je n’ai pas été tout seul à travailler.

À La Rochelle, entre Vito, Alldritt ou encore Botia, vous avez eu de bons modèles, non ?

Tous ces gars m’ont marqué. La chose la plus importante qu’ils m’ont apprise est que ça n’allait pas être facile pour moi. Rien que de pouvoir jouer, de participer à un match avec La Rochelle était déjà un événement. Je pense qu’ils m’ont permis d’avoir le goût du travail. Encore aujourd’hui, quand je vois la concurrence à mon poste, c’est un honneur de commencer un match avec mon club.

Vous êtes polyvalent mais quel est votre poste de prédilection, à proprement parler ?

Troisième ligne aile. Après, j’aime bien jouer numéro 8 de temps en temps, ça change mes habitudes et cela me permet de développer d’autres aspects de mon jeu.

Et le poste de centre ?

Je le fais plus pour dépanner quand il y a un 6-2. Après, tant que je peux jouer, tout me va, que ce soit centre, ailier, deuxième ligne. Je suis prêt à évoluer partout s’il le faut.

Comment vous êtes-vous senti après votre repositionnement en centre samedi ? On vous a vu efficace en défense, notamment…

Sur la défense, ça ne change pas tant de choses. Sur la fin de match, j’ai donné tout ce qui me restait pour remplir mon rôle. Mais je commençais à être un peu fatigué (sourire).

Vous devez être impatient à la perspective de revenir à Nantes, samedi, où vous êtes passé lors de votre formation de rugbyman ? On sait aussi que vous êtes attaché à Angers, votre ville d’origine, voisine de Nantes…

Oui, ça va être top. J’ai la chance d’avoir des copains de lycée qui viendront au match et je retrouverai pas mal d’autres personnes avec qui j’ai grandi. Concernant Angers, un de mes plus grands regrets est de ne pas de pouvoir y retourner régulièrement. Mes parents habitent à une demi-heure et je n’ai pas toujours le temps d’y aller. Je suis en tout cas super fier d’avoir été formé au SCO. C’est un petit club mais il est bien structuré, géré par des personnes super motivées et qui se battent pour faire quelque chose de bien.

Pour finir, revenons-en à l’actualité. Comment appréhendez-vous l’approche du 21 août, jour d’annonce du groupe pour le Mondial ?

Je l’appréhende comme une chance d’être dans les trente-trois. Je suis déjà honoré d’avoir été retenu pour cette préparation. Cet été, j’ai gagné de l’expérience pour les années à venir. Je ne pensais pas vivre toutes ces choses. J’ai tout à gagner dans cette aventure. Alors, l’attente, je la vis très bien. Je donnerai le maximum jusqu’au bout pour être dans le choix final du staff. Après, ça ne m’appartient plus.

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