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Coupe du monde de rugby 2023 - Ce que pensent nos politiques du Mondial

Par Clément Labonne
  • Aurélien Taché (EELV), Maxime Sauvage (PS), Marc Ferracci (Renaissance), Éric Ciotti (LR) et Julien Odoul (RN) ont répondu à nos questions sur le Mondial 2023.
    Aurélien Taché (EELV), Maxime Sauvage (PS), Marc Ferracci (Renaissance), Éric Ciotti (LR) et Julien Odoul (RN) ont répondu à nos questions sur le Mondial 2023. Assemblée Nationale - Icon Sport
Publié le Mis à jour
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La Coupe du monde suscite l’intérêt du monde politique. Cinq députés de tous horizons (EELV, PS, Renaissance, LR et RN) ont confié leurs espérances et leurs craintes pour cette grand-messe du rugby.

Le sport est un puissant outil politique. Avant les Jeux olympiques de Paris qui approchent à grands pas, le petit monde politique aura les yeux rivés sur la Coupe du monde de rugby (8 septembre - 28 octobre) pour juger, analyser et commenter les performances du XV de France et la bonne organisation du Mondial. Contrairement à 2007, le sélectionneur des Bleus a (très) peu de chance d'être nommé secrétaire d'État chargé des Sports et de susciter l’ire des parlementaires et du grand public. Aujourd’hui, le rugby français est loué de gauche à droite en passant par le parti présidentiel et chacun attend qu’Antoine Dupont et sa meute soulève le trophée Webb-Ellis, le 28 octobre prochain. Mais d’EELV au RN, les craintes et les espérances sont diverses à quelques semaines du coup d’envoi de la grande fête.

"J’espère que le rugby deviendra un grand sport populaire"

Il est député d’Europe-Écologie Les Verts et supporter du Stade rochelais. Originaire des Deux-Sèvres, Aurélien Taché est issu d’une famille de rugbymen mais assure qu’il "n’aurait pas fait le poids, même à la charnière". Pour lui, le Mondial de rugby est une occasion capitale pour que le ballon ovale change de dimension. "J’espère que le rugby deviendra un grand sport populaire. C’est déjà le cas dans les territoires ancrés de ce sport où les jeunes vont naturellement jouer au rugby, mais cela n’est pas le cas partout. Par ces valeurs, j’espère que ce sport touchera un nouveau public. À Cergy, nous allons d’ailleurs organiser des diffusions de matchs pour faire venir un maximum de jeunes et qu’ils me disent : Monsieur le député, j’ai envie de faire du rugby ! J’espère que ce Mondial va irriguer au maximum notre société des valeurs de la solidarité et de la fraternité. Nous avons une société très fracturée et le sport doit servir à rassembler. Et le rugby, qui est le plus collectif des sports, doit vraiment être exemplaire ".

Voici la compo des Bleus pour démarrer la Coupe du monde face aux All Blacks !!! \ud83d\udd25#XVdeFrance #RWC2023 pic.twitter.com/FOQJ69i6ox

— RUGBYRAMA (@RugbyramaFR) September 6, 2023

Mais pour devenir ce fameux grand sport populaire, le rugby doit inonder l’Hexagone. Pour Maxime Sauvage, député du Parti socialiste, la Coupe du monde n’est pas assez présente dans l’espace public. "On est très content que la France organise cette grande compétition internationale. Ces compétitions sont des objets politiques. Ce n’est pas simplement un "one shot" c’est une brique de plus pour devenir une grande nation du sport. Dans ce contexte, mon grand regret est qu'on n'en parle pas beaucoup. Le match d’ouverture va être exceptionnel, on va vivre deux mois superbes dans neuf villes de France et on sait que les belles épopées peuvent être bénéfiques pour le pays".

Un regret balayé par Marc Ferracci, député Renaissance : "Une actualité chasse l’autre… Je pense qu’à l’automne l’exposition publique et médiatique de la Coupe du monde sera forte. Et l’engouement des Français aussi !". Ancien centre en universitaire, l’élu des Français établis hors de France semble avoir retrouvé ses premières amours en termes de jeu. "J’ai le sentiment que lorsque le virage du professionnalisme a été pris, avec un jeu plus physique, le rugby français a un peu perdu les atouts qui faisaient sa force: l’inspiration, l’évitement… Lagisquet plutôt que Lomu. Mais le French flair semble de retour avec l’équipe de France actuelle : cela promet une Coupe du monde riche en émotions !".

À droite, l’inquiétude sécuritaire

Ce Mondial sera évidemment scruté par la planète ovale avec plusieurs regards : sportif, organisationnel et sécuritaire. Sur ce dernier point, la France joue gros. En mai 2022, l’Europe du football avait été choquée et scandalisée par le fiasco de la finale de Ligue des champions, entre le Real Madrid et Liverpool. Des supporters avaient notamment été gazés et n’avaient pas pu rentrer dans le stade de France, alors qu’ils détenaient un billet pour la rencontre. Un an après ce triste épisode, Éric Ciotti s’inquiète de pareils débordements pour la grand-messe du rugby mondial.

"Le plus grand des périls, c’est celui du désordre. Après les émeutes urbaines que nous avons connues, et face à la contamination générale de la violence dans nos villes, il est difficile de ne pas s’inquiéter d’une réitération des scènes de la finale de Ligue des champions 2022. Ce stade doit accueillir la phase finale de la Coupe du monde de rugby et j’espère qu’aucun de ces matchs ne sera perturbé. Nous avons le devoir d’assurer la sécurité des nombreux spectateurs, français et étrangers, qui se déplaceront pour participer à cette grande fête du rugby. C’est une obligation à laquelle nous ne pouvons pas manquer, il en va de notre crédibilité internationale. La hausse de l’insécurité a profondément altéré l’image de notre pays à l’internationale, et tout particulièrement l’image de Paris. Pour la France, cette Coupe du monde de rugby est la dernière possibilité de faire mentir cette mauvaise réputation que notre pays a malheureusement acquise" explique le président des Républicains.

Même son de cloche au Rassemblement national. Julien Odoul, député de l’Yonne, se concentre sur le stade de France, une enceinte qu’il estime aujourd’hui sensible. "On peut redouter des débordements, et que certaines bandes de voyous et de racailles viennent avant et après les matchs pour pourrir l’ambiance en s’attaquant aux touristes et aux supporters et se donner à leur passe-temps favori qui sont la violence et les pillages. Thierry Henry avait d’ailleurs bien précisé que "la Seine Saint-Denis n’’était pas Paris" et que l’environnement était très différent. Au-delà des matchs, nous allons avoir des touristes et des supporters qui profiteront de leur séjour en France, un séjour qui pourrait être entaché par des désagréments liés à l’insécurité et la délinquance, qui ne sont toujours pas contrôlées et contenues".

Des craintes auxquelles Marc Ferracci a tenu à répondre. "Crier au loup est plus facile que d’organiser un événement de cet ordre. Et on n’entendra sans doute pas ces voix critiques faire leur mea culpa lorsque la compétition se sera parfaitement déroulée". Pour le député écologiste, cette dimension sécuritaire n’est à l’inverse pas un sujet. "Je n’ai pas vraiment d’inquiétude, je ne vois pas ce qu’il pourrait se passer, à part un accident grave. Je suis confiant mais vigilant".

Une victoire pour rien ?

Parmi les cinq députés, seule une question a suscité l’unanimité : "Pensez-vous que, comme le football en 1998, ce Mondial peut être un grand moment de réconciliation nationale en cas de victoire finale ?". Tous sont pessimistes. Question d’époque, de société et de notoriété par rapport à cousin du ballon rond, le rugby ne semble pas encore avoir la puissance de frappe nécessaire d’un point de vue sociétal. "On a absolument besoin de ce moment de ferveur. Mais je suis très prudent. J’ai trop souvenir de ce qu’il s’est passé en 1998 avec l’équipe “black-blanc-beur”. Quatre ans plus tard, on avait l’extrême droite et Jean-Marie Le Pen au deuxième tour" rappelle Maxime Sauvage (PS), vite rejoint par Aurélien Taché (EELV).

"Une victoire aussi belle soit-elle, ne pourrait pas venir combler ces vingt ans de divisions et de montée de la haine en France. Je suis nostalgique de cette France “black-blanc-beur” où on écoutait tous un peu la même musique, on regardait le football et sur le plan politique on entendait pas trop parler de l’extrême-droite. Aujourd’hui, la France s’est fracturée". Marc Ferracci, représentant du parti présidentiel, ose la comparaison avec une autre épopée iconique. "Il ne faut pas prêter aux compétitions sportives des fonctions qu’elles n’ont plus vraiment de nos jours. Nous ne sommes pas dans l’Afrique du Sud de 1995".

À droite, Éric Ciotti et Julien Odoul expliquent également qu’une victoire française ne fusionnera pas "deux France irréconciliables", selon les dires du député RN. "En 2018, les Bleus ont gagné la Coupe du monde de football et cela n’a pas rassemblé la nation, ni apaisé les quartiers ou donné à certains jeunes l’amour du drapeau. Cela aura évidemment une importance pour les fans de rugby et ceux qui sont attachés à la fierté nationale et aux succès de la France, mais d’un point de vue social il ne faut pas se leurrer. D’autant que le rugby n’intéresse pas et ne concerne pas du tout un grand nombre d’individus dans les quartiers, qui eux sont principalement fans de football. C’est triste, mais une victoire des Bleus parlera à une autre France, celle du terroir, des territoires, des valeurs".

Le président des Républicains conclut sur une note un peu plus positive. "Nous l’avons expérimenté il y a peu encore avec la Coupe du monde de football et nous souhaitons tous pouvoir vivre de nouveau cette émotion collective qui mêle l’esprit de fête et l’esprit de fierté autour de la performance de nos champions. Mais, si nous devons apprécier ces moments, ne soyons pas naïfs pour autant et ne nous illusionnons pas trop vite sur l’état réel du pays. Ne boudons pas notre plaisir d’une parenthèse enchantée mais n’oublions pas que ce ne peut être qu’une parenthèse".

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Les commentaires (3)
Nigeou Il y a 8 mois Le 08/09/2023 à 08:57

On s'en fou de l'opinion des politiques

fojema48 Il y a 8 mois Le 07/09/2023 à 15:17

Il est vrai que le Rugby est un sport d'hommes et de femmes dignes, volontaires et courageux, peut-on en dire autant de ces hordes de voyous déjantées qui tournoient autour de certains stades de foot ?

Lechim Il y a 8 mois Le 07/09/2023 à 14:44

RR a "oublié" les 2 autres ....... de la FI! Tant mieux, on a évité leurs propos polémiques sur Chalumeau à la veille de l'ouverture de cette cdm!