• En 1997, l'ascenseur en touche a été autorisé.
    En 1997, l'ascenseur en touche a été autorisé. Icon Sport

200 ans d'histoire (43/52) : 1997, oui à l’ascenseur en touche

Par Jérôme Prévot
Publié le
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Ce fut une avancée énorme en termes de limpidité et de lisibilité. On put alors soulever les sauteurs en touche, et le jeu s’en trouva finalement enrichi.

La touche fut longtemps, une zone de non droit ou une foire d’empoigne, ça se bousculait, ça s’agrippait, ça se bloquait. Il y avait légion de coups d’épaule pour s’emparer de la manne de cuir céleste. Dans les années 70, on mit en place un couloir d’un mètre pour essayer de clarifier cette bataille à ciel ouvert, une première avancée qui fit date. Nous admirions les spécialistes de la conquête pour leur gabarit, leur détente, leurs superbes montées au zénith. Il fallait un sacré cocktail pour s’extraire du magma comme le faisaient les Claude Spanghero, Jean-Pierre Bastiat ou Olivier Roumat.

Mais en 1997, l’International Board prit une décision fondamentale qui devait changer une grande part de la physionomie du rugby. Il autorisa l’ascenseur en touche, mettant fin en des décennies de filouteries. Le règlement prévoyait qu’un preneur de balle en touche devait prendre son élan tout seul et faire parler sa détente, même si ses partenaires avaient le droit de le protéger en restant au sol en faisant obstacle aux interventions plus ou moins licites des adversaires. L’ascenseur c’était la pratique interdite qui consistait à propulser un sauteur en l’air ou à l’y maintenir pour faciliter sa cueillette et les avants aimaient bien tester le coup d’œil des arbitres à ce sujet pour voir jusqu’où ils pouvaient aller. L’International Board préféra donc légaliser cette pratique, ce qui au final donna un aspect stratégique inédit à cette conquête aérienne. Finie la période où on lançait la balle un peu comme une bouteille à la mer, même si on visait tant bien que mal un coéquipier. La prise à deux mains était vue comme le nec plus ultra, mais on acceptait aussi les "tapettes" pour un avant resté au sol, avec chic du chic quelques mouvements de "peel off" vers un homme lancé, servi par le dernier sauteur, dit verrouilleur. Ça nous paraissait très beau à l’époque.

La mesure de 1997 clarifia les alignements, sans forcément les aseptiser, aujourd’hui on se dit qu’elle a constitué l’une des avancées les plus fortes de l’histoire du rugby en termes de limpidité et de lisibilité. La progression s’est faite en deux temps. De 1997 à 2000, on ne pouvait saisir le sauteur qu’à la culotte. Puis on l’autorisa à prendre son partenaire aux cuisses, geste plus puissant. On a vu ainsi les sauteurs jaillir, droits comme des I à trois ou quatre mètres du sol. On s’est mis à parler des "lifteurs" ou soutiens, de "blocs de saut" et le lancer est devenu une arme décisive, effectuée à deux mains avec une précision millimétrique, comme la passe de demi de mêlée. On comprit vite qu’il valait mieux le faire "bombé" que tendu pour éviter les interceptions trop faciles.

Une rampe de lancement pour le jeu

L’efficacité duo ou trio sauteur-lifteur(s) devint une composante capitale de l’arsenal d’une équipe, basée sur de la technique, la coordination, mais aussi la confiance, car un sauteur confie sa sécurité à ceux qui le font monter au ciel.

La touche est alors entrée dans l’ère de la richesse avec la sophistication des annonces et des combinaisons. On a vu au moment des lancers une sorte de ballet s’enclencher, avec des mini-courses des sauteurs et des soutiens pour former au dernier moment les fameux blocs de saut… ou pas, d’ailleurs. L’option "touche courte-premier sauteur" reste un argument de dissuasion.

On a vu la touche devenir une formidable rampe de lancement pour le jeu, peut-être plus que la mêlée. Derrière une touche on peut faire des mauls évidemment, faire une combinaison au large sans fixation, un départ en fond vers la zone de jointure entre avants et trois-quarts, riche de certains espaces. On peut même tenter un truc vicieux dans le couloir côté fermé. La liste des feintes, des leurres et des combinaisons est infinie, sans compter l’option des touches réduites qui offrent aux avants des positions près des trois-quarts pour faire rebondir le jeu. On vit aussi des équipes faire sauter des avants pas particulièrement grands, mais assez légers et adroits pour se saisir du ballon en l’air. Cette clarification aura donc enrichi le jeu et le plus fort c’est qu’elle n’a pas empêché l’équipe défensive de continuer à tirer son épingle du jeu. Car l’autorisation de l’ascenseur a aussi profité aux contreurs, de plus en plus ingénieux pour anticiper les choix adverses et organiser leurs propres blocs de sauts. Certains entraîneurs ont même réfléchi à la meilleure façon de "marquer" l’alignement adverse, en individuelle ou en zone. C’est dire si ça va loin.

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