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"Dupont, c'est Messi ou Ronaldo", assure Bruce Graig président de Bath

Par Jérôme Prévôt
  • Bruce Craig, président du club de Bath.
    Bruce Craig, président du club de Bath. Sportsfile / Icon Sport - Sportsfile / Icon Sport
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Bruce Graig, le président de Bath explique pourquoi, en Angleterre, le rugby semble moins fort qu'en France. Mais la puissance du rugby hexagonal sert aussi d'aiguillon à nos voisins d'Outre-manche.

Vu d'Angleterre comment voyez-vous la bonne santé du rugby français ?

Nous avons vécu une année très difficile, avec les faillites de trois clubs de première division, dues en partie au covid. Vous savez, il y a toujours des différences entre les deux rugbys. Vous avez beaucoup de stades municipaux, les nôtres sont privés; vous avez reçu des subventions pour le covid, nous seulement des prêts. Mais c'est comme tout, dans la vie : je crois qu'en rugby, il y a des cycles.

La popularité du rugby outre manche semble moins forte que celle du rugby français. On le voit au niveau du championnat. Pourquoi ?

Attention, les affluences commencent à redémarrer chez nous. Elles seront supérieures cette saison à celles de l'année dernière. On attend aussi une certaine excitation avec le nouveau groupe de l'équipe nationale qui comportera pas mal de jeunes, et beaucoup de choses sont en train de changer. J'espère qu'un nouveau cycle va s'enclencher. Regardez la différence entre le Top 14 et le Championship : en France, l'équipe qui reçoit gagne en moyenne beaucoup plus facilement. En Angleterre, les matchs sont plus serrés et ça s'est répercuté en Champions Cup, où les clubs anglais ont su l'emporter. Je pense que ça vient du resserrement de l'élite à dix équipes, elles sont devenues plus fortes car elles ont pris les meilleurs éléments des trois équipes qui ont disparu. Je pense que les clubs français ont un peu sous-estimé ce phénomène.

Ne pensez-vous pas que la différence s'explique aussi par la relative faiblesse du championnat de foot français ?

Je pense même que c'est la grande chance du rugby français. En Angleterre, le foot est devenu énorme avec les meilleurs joueurs du monde, c'est une évidence. Mais le rugby et le cricket restent forts. Nous gardons encore l'espoir de construire la ligue la plus forte du monde avec des équipes qui pratiquent un beau rugby comme c'est le cas actuellement avec Bath, Harlequins, Northampton, Leicester. Je vous rappelle aussi qu'avec dix équipes, on n'a que dix-huit matchs. Le sens de l'Histoire demande plus de repos pour les joueurs à cause des commotions cérébrales. Ce sera peut-être un avantage pour notre championnat.

Le rugby français dispose de droits télévisés bien plus forts que le championnat anglais, n'est ce pas un signe ? Pensez-vous rattraper ce retard?

La chance de la France est d'avoir un partenaire comme Canal +. Il donne un peu plus de 100 millions d'euros par an à la LNR, mais 40 % de cette somme va au Pro D2. Il reste 60 millions pour 14 clubs. Nous, on a environ 48 millions de droits télévisés pour le Premiership à dix équipes. C'est donc à peu près la même chose entre l'élite de nos deux pays. J'ajoute que nous allons toucher des subventions de la RFU, qui va donner 40 millions aux dix clubs en échange de tout ce qu'on a fait pour l'équipe nationale.

On assiste à un exil des joueurs anglais en France. Est-ce aussi l'un des signes de la puissance du rugby tricolore ? Vous sentez-vous capables de résister ?

Aucun joueur anglais exilé n'ira en équipe nationale. On me parle d'Arundell, mais c'est un cas particulier à mon avis : c'est un choix de vie, le concernant. Il était à la recherche d'un cadre de vie, il voulait apprendre la langue. Ce n'est pas une question d'argent. On lui offrait plus d'argent en Angleterre. Mais il est vrai que certains joueurs ont choisi de venir en France, comme Marchant, Simmonds, Ribbans, Willis. D'accord, c'est leur choix mais il faut savoir que la RFU a décidé de proposer 25 contrats de presque 200 000 euros par an à certains internationaux. Ils auront 400 ou 500 000 euros de salaire par ailleurs avec leurs clubs. Il faut savoir que les internationaux anglais sont les joueurs les mieux payes au monde. Je pense donc que les futurs internationaux anglais resteront en Angleterre.

En France, on constate une popularité grandissante du rugby vis-à-vis du grand public. En Angleterre, on a l'impression qu'il demeure très populaire dans certains fiefs traditionnels (Bath, Northampton, Leicester, Gloucester...) mais pas tellement auprès du grand public. Aimeriez-vous changer ceci ?

C'est un objectif pour nous, c'est sûr. Mais on retrouve la question des cycles. La France connaît ce phénomène de popularité depuis quatre ou cinq ans dans le sillage d'Antoine Dupont et de ses qualités exceptionnelles. C'est un peu un Messi ou un Ronaldo, en foot. est devenu une superstar et, en plus, la France a organisé la Coupe du monde. Les deux choses se sont combinées, et elles durent même si la France a été éliminée en quart alors que l'Angleterre s'est hissée en demie (ironique). Mais je le reconnais, c'était dû aussi au hasard du tirage au sort des poules.

Et donc ?

Nous allons travailler pour se rapprocher de votre situation vertueuse. La stratégie consiste, pour nous, à rapprocher les actions de la RFU et celles de PRL, la société qui s'occupe des clubs d'élite. Comme a su le faire la France. Nous sommes en train de faire un genre de partenariat qui, on l'espère, va rendre le rugby anglais plus fort dans le cycle de quatre ans qui est en train de s'ouvrir.

En quoi va-t-il consister ?

Il y aura tout un travail au niveau des réseaux sociaux, des datas, des bases de données, de tous les moyens de communication modernes. En Angleterre quand le XV de la Rose joue dans le Tournoi des Six Nations, ça fait quand même entre cinq et dix millions de téléspectateurs. C'est énorme ! Il y a donc tout un travail à faire là-dessus. Mais, je le reconnais, quand le championnat est diffusé sur une chaîne payante, TNT Sports, il y a beaucoup moins de gens qui regardent. Nous sommes soudainement confrontés à la moindre popularité de notre championnat domestique. C'est là que le rugby se heurte à la force de la Premier League de foot et qu'on perçoit la différence avec le rugby français.

Qu'ambitionnez-vous pour l'avenir proche ?

On espère que dans les prochains cycles, le rugby anglais pourra vendre ses droits d'une façon couplée entre l'équipe nationale pour le Tournoi, la Coupe des Nations et les différentes compétitions de clubs. C'est peut-être ce qui fera la différence.

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