Top 14 - "Je suis ce joueur extravagant !" sourit Enzo Forletta (Montpellier)
Contrarié par les blessures depuis le début de saison, Enzo Forletta revient, comme son club, petit à petit à son meilleur niveau. Du titre de Pro D2 avec Perpignan, en 2018, à l’équipe de France, le pilier à tout vécu. Il revient sur sa carrière.
Bientôt quatre années à Montpellier. Vous êtes passé par toutes les émotions dans l’Hérault ?
J’ai passé des années incroyables ici. Force est de constater que le choix de rejoindre le MHR était le bon. Mais c’est une période plus compliquée, j’ai eu pas mal de pépins, des blessures. La préparation physique et le début de saison n’ont vraiment pas été des moments faciles à traverser. Le staff médical arrive à me soigner et je retrouve petit à petit des sensations. Mais ça reste une saison compliquée, il faut la prendre comme un défi. À l’image de toute l’équipe, je suis en demi-teinte et j’ai du mal à enchaîner les bonnes performances.
Qu’est-ce qu’on se dit dans ces situations délicates ?
C’est dans mon caractère, je ne vais rien lâcher, continuer à bosser jusqu’à revenir à mon meilleur niveau. Je ne suis pas du style à renoncer. Je suis un mec qui veut encore plus prouver si on ne me pense pas capable de quelque chose, c’est mon moteur. Il faut simplement savoir faire le dos rond et continuer de bosser. Je veux montrer au club de quoi je suis capable. Ce n'est pas mon style d'abandonner et de penser que je trouverais mieux ailleurs. Je ne suis pas ici par hasard et je peux encore progresser.
Avant de rejoindre Montpellier, votre nom a circulé dans de nombreux clubs. Pourquoi le MHR ?
À l'époque, il y avait plusieurs propositions, mais le projet de Montpellier m’a convaincu. Ça aurait pu être à Paris, dans le Sud-Ouest ou n’importe où. Je suis quelqu’un qui aime découvrir de nouvelles aventures. Jeune, je rêvais même de jouer à l’étranger. Le projet en place et les joueurs du club ont su me convaincre. Sur les années qui ont suivi, on remporte la Challenge Cup et le Top 14. J’ai eu du nez (rires).
Mais vous auriez pu quitter Perpignan plus tôt, notamment au moment de la descente…
J’avais une relation incroyable avec le staff de Perpignan, Patrick Arlettaz, je l’adore. Perry Freshwatter, je le voyais jouer quand j’étais petit. J’avais entièrement confiance en eux. Je devais signer mon nouveau contrat tôt. Même si on fait un mauvais début de saison, on se sentait fort. On n’imaginait vraiment pas descendre, on était convaincu que ça allait basculer dans le bon sens. Je ne me voyais pas quitter le navire et ce staff. Finalement, il y a une descente…
Après une nouvelle année avec l’Usap en Pro D2, vous décidez de changer d’air…
Je savais qu’on allait finir par remonter en Top 14. Mais je voyais aussi que mon niveau stagnait. Il y a cette belle proposition de Montpellier et je signe. Avec le recul, c’était vraiment le bon choix. J'étais à deux doigts de signer à Clermont, mais quand je vois ce qu’on a fait sur les deux premières saisons…
La Challenge Cup et le bouclier de Brennus avec le MHR, c’est lequel le plus beau souvenir ?
Le plus prestigieux, c’est le bouclier de Brennus. Mais quand tu joues toute la saison et que tu loupes les deux matchs les plus importants, c’est affreux (blessé aux cervicales, il avait vu la demi-finale et la finale depuis le banc, ndlr.). C’est un regret que je garderai toujours. Je méritais vraiment, j’avais vraiment fait le travail cette année-là. Sur le bord du terrain, ça reste un moment exceptionnel. La Challenge Cup, c’est très différent, on avait vraiment eu un match compliqué entre deux grosses équipes (victoire 18-17 contre Leicester, ndlr.). L’année d’après on gagne le championnat de France et eux, celui d’Angleterre. On en parle encore avec des mecs comme Guilhem Guirado.
Et le premier avec l’Usap, comment c’est ?
Avec Perpignan, c’est la Pro D2, mais c’est incroyable. Il y avait 30 000 personnes pour nous attendre, tu as l’impression d’être un rockeur. C’est le premier, c'est forcément intense.
Après la victoire en Top 14, beaucoup de vidéos de vous avaient circulé sur les réseaux. Avec le recul, est-ce que cela a nui à votre image ?
Il y a des vidéos qui n’auraient jamais dû sortir. Au final, ça a fait rire les gens. Il y en a forcément qui critiquent, mais ça ne m'intéresse pas. Je sais qui je suis, mes coéquipiers aussi. Je suis ce joueur extravagant, qui aime bien profiter des bons moments ! Mais quand il faut travailler, je sais travailler. Certains ont pu critiquer, même des anciens présidents, mais ces mecs là, ils ne me connaissaient pas avant. Le rugby, il le regarde à moitié.
Ça permet de vous humaniser finalement ?
On reste des humains. Quand j’aurais terminé ma carrière, ce moment-là ça ne sera pas un regret, je ne suis pas un robot.
En 2021, vous touchez le Graal avec le maillot bleu…
Avoir gagné en Australie après 32 ans, c’est fou ! Il y a eu des générations incroyables, des mecs que j’admirais. Mais c’est nous qui sommes allés gagner là-bas. C’est un souvenir exceptionnel.
Cette équipe de France, on y pense toujours ?
Dans la situation actuelle, on n'y pense pas trop. Il faut d’abord être indispensable avec son club et aujourd’hui ce n'est pas mon cas. Mais à l’époque, je n’y pensais pas non plus. On sait à quel point c’est compliqué d’accrocher ces places, surtout quand l’équipe de France a tourné comme elle l’a fait pendant quatre ans. Avant d’y songer, il faut être dans un environnement qui gagne tous les week-ends et aujourd’hui ce n’est pas le cas à Montpellier. Surtout que les mecs qui sont en place sont des super joueurs.
Mais depuis quelques week-ends ça se passe mieux au MHR, quand on regarde le classement vous n’êtes finalement qu’à 7 points de cette sixième place. Vous y pensez ?
Non ! Le groupe reste humble et sait se situer. On n’oublie pas ce qu’on a vécu en début de saison. Le maintien, on y pense toujours, on est conscient de la difficulté qu’on va avoir à terminer cette saison, on continue de bosser dans l’ombre.
Quel est l’objectif du club sur cette fin de saison ?
On doit continuer à progresser sur nos matchs. Il faut être plus régulier et réussir à effacer les temps faibles qu’on connaît en défense. C’est sûr qu’on a beaucoup progressé en attaque et qu’on marque plus de points. En défense, on a toujours de beaux progrès à faire. À Oyonnax, on marque 40 points, mais on en prend 35… Si on veut replacer ce club au niveau qui est le sien dans le championnat, il faut progresser sur cet aspect. C’est l'exigence du Top 14.
L’arrivée du nouveau staff a fait du bien ?
Ça fonctionne mieux qu’en début de saison. La mayonnaise est en train de prendre.
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter ?
De ne plus avoir des pépins physiques, même si ça fait partie de la carrière d’un rugbyman. Les vieux m’en parlaient quand j’avais 20 ans ? Maintenant, c’est moi qui suis à leur place. (rires)
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