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Bouscatel : «J’ai commis quelques erreurs…»

Par Nicolas Zanardi
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    Bouscatel : «J’ai commis quelques erreurs…»
Publié le Mis à jour
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Avant de se relancer au printemps, le Stade toulousain avait connu une passe difficile en début d’année. René Bouscatel, son président, avait alors porté un regard lucide sur la situation actuelle, dans une période charnière de renouvellement de l’effectif.

Quatre défaites lors des quatre derniers matchs, du jamais vu depuis presque quarante ans : la situation sportive actuelle du Stade toulousain vous interpelle-t-elle ?

Que voulez-vous que je réponde à ce genre de question ? En ayant perdu quatre matchs sur nos six premières rencontres, la preuve est faite que tout ne fonctionne pas tout à fait comme nous le souhaiterions. Mais je peux vous dire que nous avons identifié les problèmes qui sont les nôtres, et les solutions qu’il est nécessaire d’apporter.

Quels sont ces problèmes ?

Les principaux concernent évidemment un nombre de blessures très important à des postes bien déterminés, qui font que nous ne sommes pas en mesure d’être aussi efficaces que nous l’attendions. En ce moment, nous avons quatre piliers indisponibles dont trois sont blessés et un avec la sélection sud-africaine, et trois de nos numéros 8 sont absents. Tous les clubs ont autant de blessés que nous, sauf qu’en ce qui nous concerne, ils sont aux mêmes postes. Il y a une forme de fatalité là-dedans.

Des soucis qui sont les mêmes que la saison dernière...

En connaissance de ces problèmes, nous avions apporté quelques correctifs à notre effectif lors de l’intersaison, mais les blessures que je viens de rappeler sont venues annihiler ces améliorations. Toutefois je suis certain qu’avec la reprise de quelques joueurs, nous nous améliorerons très vite dans les secteurs où nous sommes manifestement déficients.

Toulouse a déjà recruté un joker en première ligne. Faut-il en envisager un deuxième pour parer aux problèmes à court terme ?

À court terme, je ne vois pas ce que l’on peut faire de plus. Les joueurs malades, blessés ou indisponibles vont finir par reprendre. Si l’on retrouve un ou deux joueurs à des postes clés, nous serons beaucoup plus performants. Plus que jamais en Top 14, ce qui fait la différence entre une victoire et une défaite est très ténu. Il suffit de presque rien. On sait ce que l’on doit mettre en place pour retrouver un statut plus conforme à nos prétentions.

Toulouse semble n’avoir jamais été autant perturbé par les blessures que depuis l’inauguration de votre centre d’entraînement la saison dernière. Drôle d’ironie…

En dehors d’être un lieu de vie dont nous avions besoin, notre centre d’entraînement est avant tout un outil de travail physique et de récupération dont les installations ont été choisies par le staff sportif, les préparateurs physiques, les kinés, les médecins… Ils l’ont souhaité cet outil de performance, ils l’ont eu. L’important était de favoriser la récupération proche du match. S’il faut trouver une cause aux blessures, elles sont davantage liées aux cadences et à

l’enchaînement des matchs. Nos joueurs ayant beaucoup joué ces dernières saisons, sur tous les fronts.

Faut-il vraiment invoquer la fatalité alors que des modifications ont été apportées au staff la saison dernière par rapport à des constatations similaires ?

Certaines blessures relèvent de l’accident, d’autres sont peut-être dues à des détails que l’on peut éviter, même si cela est très difficile. Et comme toujours dans ce genre d’enchaînement, on est obligé de prendre des risques avec certains joueurs, même s’ils sont toujours mesurés. Mais il y a aussi d’autres facteurs, comme par exemple le fait que les internationaux n’ont pas pu disputer de match de préparation. N’est-ce pas un élément de prise de risque ? Autre chose : cette règle qui veut qu’un match soit comptabilisé pour un joueur ayant passé plus de vingt minutes. De ce fait, les entraîneurs peuvent être amenés à retarder leur coaching. Ne s’agit-il pas encore d’un élément de prise de risque supplémentaire ? En Angleterre, par exemple, on ne comptabilise que les matchs où les joueurs jouent plus de quarante minutes. Non seulement cela implique moins de risque, mais cela paraît plus pragmatique.

Vous citez souvent l’exemple anglais…

Parce que nous gagnerions à le suivre ! En Angleterre, la convention est fixée sur huit ans, c’est-à-dire sur du moyen terme, avec deux objectifs : que l’équipe d’Angleterre soit la plus performante possible et que leur championnat devienne une référence. En France, la convention est uniquement centrée sur les objectifs de l’équipe de France. En Angleterre, le rapport est donnant-donnant. Un groupe de 32 joueurs a une limite de 32 matchs, et il y a une adhésion réciproque. Les clubs ont ainsi accepté un douzième match de leur équipe nationale, quand l’équipe nationale limite à dix le nombre de sélections par joueur. Et chez nous, c’est une délégation du service public qui justifie que la FFR impose ses vues, et crée des blocages plutôt qu’une synergie.

Revenons au Stade. Toulouse vit une période difficile alors que celle des doublons, tant redoutée, n’a pas encore commencé et produira d’autres soucis. Commencez-vous à craindre une non-qualification pour les phases finales ?

Non. Si je commence à craindre une non-qualification dès la sixième journée… Un résultat moyen aurait été de compter une victoire supplémentaire. Nous avons grillé certains jokers, mais il nous reste encore du temps pour les récupérer. Je suis certain qu’avec le retour des blessés, notre conquête sera meilleure et permettra à notre jeu de se remettre en place. Je ne vais pas vous dire que notre situation actuelle me fait plaisir : je reste attentif mais elle ne m’inquiète pas. Et puis, si l’on veut être positif, on peut se dire que certains jeunes jouent et acquièrent de l’expérience. Il ne faut pas s’inscrire dans un état d’esprit négatif : nous avons toujours su nous remettre en cause dans la victoire, nous le faisons aussi dans la défaite.

À ce stade de la saison, le recrutement effectué cet été vous donne-t-il satisfaction ?

C’est extrêmement difficile à dire. Pour certains, il n’y a pas de problème. Pour d’autres, on ne peut pas dire qu’ils arrivent dans les meilleures conditions. Parce que nos recrues doivent s’adapter à un nouveau jeu, un système différent, et qu’elles ne peuvent pas non plus récupérer faute de turnover suffisant.

L’exemple de Neemia Tialata pose tout de même question, puisque recruté pour être doublure de Johnston au poste de pilier droit, il se trouve décalé à gauche faute de rendement au poste pour lequel il avait été recruté…

Ce n’est pas comme cela qu’il faut voir les choses. Si ce déplacement a eu lieu, c’est parce que nous avons recruté un joker qui nous paraissait à même d’évoluer à droite alors que Tialata semble plus à l’aise à gauche pour le moment. Mais là, on rentre dans un choix sportif lié aux circonstances. Si Ferreira ne s’était pas blessé, Tialata serait fixé à droite.

Au-delà du recrutement, la problématique actuelle concerne les fins de contrat de joueurs emblématiques comme Dusautoir, Albacete, Nyanga, Médard… Où en êtes-vous ?

Les joueurs sollicités le sont par d’autres. Il y a quelques clubs qui sont sur tous les joueurs. C’est parfois un mode de communication, cela permet d’alimenter les colonnes des journaux. (ironique) Heureusement qu’ils ne recrutent pas tous les joueurs qu’ils annoncent, autrement ils dépasseraient le salary cap. En ce moment, nous sommes en période de renouvellement. Je suis en discussion avec certains, les choses avancent doucement.

Tous ces joueurs resteront-ils au Stade, ou y aura-t-il des départs ?

S’il y a des départs, il y aura des arrivées…

Votre entraîneur des avants, William Servat, est également en fin de contrat à l’issue de la saison. Sa prolongation sera-t-elle liée aux résultats sportifs à l’issue de la saison ?

Le cas de William Servat n’est lié à rien, nous en parlerons en temps opportun avec Guy Novès, qui est le patron du sportif. Je peux vous assurer que William n’est pas en danger. Le bilan sera effectué à l’issue de la saison, et il n’est pas obligatoire que ce bilan détermine le choix. Le staff conserve toute ma confiance.

Hors de question donc d’imaginer un bouleversement du staff en cours de saison ?

Ce n’est pas dans les habitudes de la maison. Sauf accident véritablement particulier, il n’y a pas de raison de changer quoi que ce soit. Nos entraîneurs ont été choisis pour leurs compétences, qui ne sont pas remises en question. Si la réussite n’était liée qu’à cela… (silence) Vous savez, je crois que j’ai commis quelques erreurs. Il y a quelques années, j’ai cru que le Stade toulousain pourrait s’auto-suffire. Ce n’était peut-être pas toujours la solution. Il faut un renouvellement progressif, mesuré, cohérent. Il ne sera pas non plus très important cette année, mais effectué pour apporter un plus. À ce titre, il n’y a d’ailleurs qu’en rugby où, à moins d’un un an de la prochaine saison où se disputera une Coupe du monde, on ne sait pas encore quel sera le calendrier, si nous jouerons pendant la Coupe du monde et si oui, combien de matchs. Et donc, comment nous devons recruter pour passer ce moment difficile… Il y a quatre ans, nous avions mis en place des jokers Coupe du monde. Il serait temps de savoir si nous en aurons l’an prochain. Il n’y a qu’à la LNR que l’on peut penser que le recrutement s’effectue pendant la période officielle des mutations…

Avec le recul, le titre de 2012 n’a-t-il pas été un bien pour un mal, dans le sens où le club a conservé certaines certitudes par rapport à l’émergence de nouveaux modèles ?

Le modèle du club est simple, fondé sur une indépendance capitalistique et une autonomie financière pour permettre la pérennité des résultats sportifs. Nous sommes le seul club dans cette situation, sans mécène ni subventions des collectivités locales. Ce n’est pas une fierté, c’est un constat. Si nous pouvions être aidés notamment pendant cette période où nous ne pouvons pas utiliser le Stadium, ce ne serait pas plus mal. Aujourd’hui, des investisseurs apportent beaucoup à d’autres clubs, mais dans l’objectif de parvenir à un fonctionnement semblable au nôtre, à savoir un club qui s’autofinance. Notre modèle est donc bon. Le problème, c’est que dans la mesure où le modèle sportif est basé sur la formation et le recrutement de jeunes joueurs français, il s’en trouve déstabilisé par les contraintes qui s’ajoutent tous les ans.

Justement, l’impact de ces contraintes n’a-t-il pas été sous-évalué ?

Nous les avons mesurées, et nous avons conscience que le modèle qui est aujourd’hui le plus adapté aux contraintes du Top 14 est celui fondé sur des joueurs étrangers en fin de carrière engagés sur des contrats courts. Ce qui est un apparent paradoxe, puisque les clubs qui pâtissent de ces contraintes sont ceux qui travaillent dans l’intérêt - pas toujours évident - des résultats de l’équipe de France. Si le XV de France est la priorité, aux instances du rugby français de trouver les solutions et à mon sens, ce n’est pas en créant les conditions d’un championnat inéquitable et dévalorisé qu’elle y parviendra. Mais quoi qu’il en soit, lse meilleur système reste celui qui durera le plus. J’attends de voir la pérennité des clubs aux politiques de recrutement à court terme. Personnellement, j’en doute. La formule est de Guy Novès : le but n’est pas d’être champion tous les ans, mais d’être en mesure d’y prétendre tous les ans.

Le conseil de surveillance du Stade va se réunir ce lundi…

… Comme tous les trois mois. L’ordre du jour est à peu près toujours le même à cette période de l’année. D’ailleurs, c’est le calendrier qui est pareil : on fixe les objectifs en début de saison, des points d’étape au cœur de celle-ci, et à la fin, on tire des courbes et effectue le bilan.

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