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1999, la conservation

Par Jérôme Prévot
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    1999, la conservation
Publié le Mis à jour
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Les Wallabies deviennent champions du monde avec une méthode basée sur le désir de posséder la balle à l’extrême pour faire courir l’adversaire.

En 1999, au pays de Galles, les Wallabies deviennent la première équipe à gagner deux fois la Coupe du monde. On les savait dangereux mais on voyait plutôt les All Blacks de Jonah Lomu à leur place. Ces Australiens-là sont souvent décrits comme moins flamboyants que ceux des années 80. Mais le rugby avait changé. Sur les terrains, les espaces s’étaient considérablement réduits. L’évolution des règles aussi avait modifié l’approche du jeu. Rod McQueen, l’entraîneur de ces Australiens, eut le mérite de comprendre que désormais, tout allait se jouer sur la conservation du ballon car le règlement pénalisait ceux qui pourrissaient les sorties des regroupements. On pouvait donc extraire facilement et rapidement les ballons des mêlées spontanées. McQueen (qui n’avait jamais été international) décida de baser le jeu des Wallabies sur une longue succession de phases afin de fatiguer et de déboussoler la défense adverse. Il s’était forgé ses convictions en s’occupant des Brumbies en Super Rugby, la franchise qui eut un temps la réputation de mieux jouer que sa propre équipe nationale.

LARKHAM, FACTEUR X

McQueen s’appuya d’ailleurs sur une charnière venue de Canberra pour orchestrer son jeu : George Gregan et Stephen Larkham. Il avait eu l’intuition de faire bouger Larkham de l’arrière (son premier poste) à l’ouverture en comprenant que sa capacité à lire le jeu était sans égale et sa panoplie technique exquise. Ces Wallabies-là étaient capables de proposer des séquences longues programmées sur six ou sept temps de jeu en rationalisant les positions et les déplacements des uns et des autres. McQueen faisait aussi le pari qu’après cette série de temps de jeu planifié, ses joueurs auraient assez de talent et de personnalité pour improviser les derniers gestes qui finiraient de transpercer la digue adverse. Avec des talents offensifs comme Larkham, Horan, Burke ou Roff, ce présupposé ne fut jamais démenti. McQueen eut aussi le nez de faire jouer un centre clairement massif et pénétrant : Daniel Herbert pour faire rebondir le jeu (le talentueux Jason Little en fit les frais).

ESSAIS À LONGUE PORTÉE

On a souvent qualifié son rugby de « scientifique » dans un sens presque péjoratif. C’est vrai McQueen donna un ordinateur à chaque joueur et leur faisait passer des CD-Rom. Il les invitait aussi à remplir un carnet de bord avec leurs qualités et leurs faiblesses : « Il y avait quelque chose de clinique dans sa façon de voir, expliquait Steve Larkham, mais nous nous y sommes habitués. Cela a été rendu plus facile au fil de victoires que nous n’espérions plus. » McQueen essaya évidemment de donner à son équipe les moyens physiques de mettre ses plans à exécution : préparations médicale et physique suivies sur l’année pour obtenir des hommes aussi endurants qu’explosifs, très costauds sur les appuis du bas. Dans la mémoire collective, ces Wallabies ont laissé une curieuse impression. On osa même les qualifier « d’ennuyeux » alors que, pourtant, ils maintenaient le ballon en vie. En fait, ils étaient surtout rigides et précis. D’ailleurs les images de ce début des années 2000 nous rappellent des essais de belle facture (jusqu’à dix ou quinze temps de jeu, inimaginable dix ans auparavant). Mais McQueen n’était pas un tribun comme Alan Jones, il n’était pas non plus un adjudant colérique. Mais son souci du détail était tel qu’il avait persuadé ses joueurs que rien ne pourrait leur arriver : « Ce que je garderai de cette équipe, expliquait-il à la fin de son mandat riche de 80 pour cent de victoires, c’est le sang-froid dont elle a toujours fait preuve quand elle était sous pression. Lorsque nous avons rencontré un problème, nous avons toujours su le surmonter. » ■

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