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Raphaël Chaume : soleil du sud

Par Léo Faure
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    Raphaël Chaume : soleil du sud
Publié le Mis à jour
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Pour la première fois cette saison, l’Auvergnat est parvenu à transcender la concurrence à son poste pour aborder les phases finales de Top 14 dans la peau d’un titulaire. Rencontre avec un personnage entier.

À Clermont, Raphaël Chaume détonne. De cet accent mélodieux, qui vous chatouille l’oreille et déroule, dans son trait d’écume, tout le parchemin de clichés qui vont bien sur le Sud-Est : la bouche ouverte plus grand que le cœur, l’incartade facile et le train de vie bruyant. Le tableau est trop facile, pas assez nuancé. Trop loin de la simplicité et la bonne éducation du pilier clermontois. Trop « nordiste » pour être tout à fait exact. Il a pourtant la dent dure. « Il ne faut pas avoir une mauvaise image des gars du Sud. Quand nous sommes arrivés à Clermont, avec Ludo (Radosavljevic, N.D.L.R.) les gens nous ont un peu collé cette étiquette », se souvient le Provençal. « C’est vrai qu’on parle un peu fort. On est chambreur, on gesticule. Au début, il y avait de la distance avec les autres jeunes. En Auvergne, on ne te donne pas la confiance, il faut aller la chercher. C’est une bonne chose parce qu’ensuite, quand tu deviens ami, c’est pour la vie. Chez nous, c’est un peu différent. Mais quand les Auvergnats ont appris à nous connaître, tout s’est bien passé. » Chaume, lui aussi, a appris à s’ouvrir au fil de son parcours, de Vinsobres à Clermont, en passant Hyères, Orange et Aix-en-Provence.

Rado ? « C’est mon meilleur ami. Rien de moins »

Le caractère, pourtant, est toujours là. Trempé, depuis tout jeune. « J’étais un sanguin… (il réfléchit). Sur les terrains, encore, ça passe, mais hors du terrain, j’étais un adolescent un peu explosif. Les coups pouvaient tomber assez vite. Parfois, ça me tombait surtout dessus, remarquez ! Je ne gagnais pas tout le temps (il sourit). » À 13 ans, à la marge d’un de ces terrains de Fédérale qui sent bon le souffre et le camphre, Chaume en a fait la démonstration.

Sur le terrain principal du Stade de Fargues (Vaucluse) se jouait Le Pontet-Valréas, avec son lot de rivalités locales et d’inimitiés. Derrière les poteaux, une bande de gamins rejouait le match. Comme chez les grands, les mêlées se sont relevées et les joueurs en sont venus aux mains. « On s’était un peu chamaillés. Rien de grave, une petite « guégerre » entre jeunes. » Ce jour-là, Raphaël Chaume fit la rencontre de Ludovic Radosavljevic. Il se souvient : « Son père jouait au Pontet, le mien à Valréas. Pendant la bagarre, disons que nous n’étions pas exactement dans le même camp. » Il poursuit : « Depuis, on fait tout ensemble. On s’était retrouvé en sélection du Vaucluse, quelques mois après notre « rencontre ». À l’époque, je jouais numéro 8. Petit à petit, on a appris à se connaître puis à sympathiser. On ne s’est plus quittés : les sélections de Provence ensemble, puis l’entrée au pôle espoirs d’Hyères. On jouait ensemble à Aix-en-Provence puis on a rejoint Clermont en même temps. Aujourd’hui encore, nous avons pris des appartements dans le centre ville, à 200 mètres l’un de l’autre autour de la place de Jaude. Ludo, c’est devenu mon meilleur ami. Rien de moins. »

En Auvergne, Chaume est passé du rang d’espoir à professionnel. Il emprunte aujourd’hui, pour la première fois, les galons de titulaire à l’approche d’une phase finale. À 27 ans. Le temps a fait son œuvre. Le joueur a aussi appris à se canaliser. « Je n’ai jamais douté mais ici, à Clermont il y a des internationaux à tous les postes. Sa place, il faut aller la chercher. Alors bien sûr, parfois, je me suis impatienté. Je me rongeais le cerveau pendant des journées entières. Quand je ne jouais pas assez à mon goût, il a fallu que ma copine me canalise. Je devenais invivable. Mais ma patience a aussi forgé mon caractère. Mon parcours m’a aidé à m’apaiser. » Comme le fait de devenir papa, à 21 ans seulement. « Enzo aura 6 ans en juillet et Victoria a 3 ans. Ils m’ont énormément calmé. Bon, pas totalement, hein ! J’ai gardé mon petit caractère (il sourit). »

L’aube paysanne

Sa quiétude, finalement, Raphaël Chaume ne la trouve pleinement que lorsqu’il retourne chez lui. À Vinsobres, petit village de 3 000 âmes à la pointe Sud de la Drôme, à portée de drop du Vaucluse. Ici, la famille Chaume cultive la terre de génération en génération. De la vigne, quelques oliviers et une vue imprenable sur le Mont Ventoux. « Mon grand-père avait déjà des vignes, qu’il apportait à la coopérative pour les faire vinifier. Il ne le faisait pas lui-même. Quand ma mère a repris l’exploitation, elle a créé son domaine, avec une vinification sur place. Mon père, fils d’enseignant, l’a rejointe et ils ont créé le domaine ensemble. C’est un monde auquel je suis attaché. »

Tellement qu’en marge du pôle espoirs d’Hyères, Raphaël a passé un BEP Vignes et vins, pendant deux ans. « Des études sur la culture de la vigne et l’œnologie. » Il a ensuite basculé sur un Bac pro, toujours dans le domaine viticole. Il garde l’aube paysanne au plus proche de son cœur. « Ma terre, c’est mon point d’ancrage. Je suis bien à Clermont, depuis huit ans mais parfois, le Sud me manque. Cela fait un bien fou quand je rentre à la maison. Vinsobres, c’est chez moi. C’est une terre agricole et un esprit auxquels je suis attaché. Paysan, c’est un métier dur. Il n’y a pas de vacances, pas de week-ends. Mais je sais aussi que c’est le plus beau métier du monde. Vous travaillez dehors, sur vos terres. Et si en plus vous avez une jolie vue sur le Ventoux, c’est encore mieux (il sourit) ». Pour garder contact, Raphaël Chaume écume les marchés et les restaurants de la région clermontoise, en VRP de luxe du vin produit par ses parents. On le croise ici à Vinidôme, grand-messe annuelle du vin en Auvergne. Un peu plus tard, on le trouve au salon viticole de Clerlande, bourgade au nord de Clermont, à faire déguster son élixir. « J’aime bien me retrouver sur de petits festivals de vin. On prend le temps de rencontrer les gens, on évite de trop parler de rugby. Le fromager du coin est là, le boucher juste à côté. On boit quelques quilles, on profite, on parle de nos passions. J’ai aussi besoin de cela. » Pour trouver un équilibre qui, cette saison, n’a jamais semblé aussi payant.

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