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Travers : « Si j’y pense, je vais tomber »

Par Marc Duzan
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    Travers : « Si j’y pense, je vais tomber »
Publié le Mis à jour
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Il y a vingt ans, Laurent Travers était sacré champion d’Europe avec Brive, face à Leicester. Souvenirs, souvenirs…

Quelles images gardez-vous de la dernière demi-finale de Champions Cup, face à Leicester ?

Je revois un match engagé, intense et très physique. à Nottingham, les deux équipes avaient misé sur l’impact physique. Ce fut serré (19-16). Mais le Racing prit le score le premier et fut plus réaliste et plus efficace.

Le contexte sera-t-il différent dimanche ?

Welford Road, le stade des Tigres, est déjà un contexte hostile. Les Anglais seront également très revanchards. Ils ont la dernière demi-finale en travers de la gorge et veulent prouver que leur défaite inaugurale, à Glasgow (42-13), est un accident de parcours. Les Écossais ont marqué sur deux interceptions. Le score n’est pas fidèle à la réalité du match.

Depuis mardi, le chapitre de « l’affaire des corticos » est clos. Comment le groupe a-t-il réagi ?

Malheureusement, on ne peut pas tourner la page comme ça. On ne passera pas à autre chose en un claquement de doigts. Il restera toujours des traces. Les choses ont été faites à charge.

Le groupe s’est-il néanmoins ressoudé à la suite de ces évènements ?

Je pense, oui. Si ça gagne, tout le monde dira même que ça nous a rendu service… Mais dimanche, il n’y aura pas de revanche sur qui ou quoi que ce soit. Nous sommes des compétiteurs et voulons sortir de l’une des deux poules les plus relevées du tournoi.

Emotionnellement, ces deux dernières semaines ont été très chargées. Comment les avez-vous vécues ?

La vie n’est pas un long fleuve tranquille… Les derniers évènements ont été difficiles à accepter. On nous a manqué de respect mais pour tout vous dire, la disparition d’Anthony Foley (l’entraîneur du Munster est mort d’un œdème pulmonaire dimanche dernier, N.D.L.R.) a permis de remettre les choses à leur juste place. Lui n’aura plus la chance de serrer ses enfants dans ses bras. C’est autrement plus grave.

Dans de telles circonstances, se projette-t-on sur sa propre mort ?

On n’est rien, n’est-ce pas ? La veille au soir, Anthony Foley se portait à merveille, il avait même partagé un verre avec quelques-uns de nos joueurs (Casey Laulala et Ronan O’Gara). Le lendemain, il n’était plus là. On oublie trop souvent que nous sommes juste de passage… Le quotidien et son engrenage nous éloignent de ces vérités-là.

Cette saison 2016-2017 est chargée de symbole, puisqu’elle marquera les 20 ans de votre titre de champion d’Europe avec Brive. Qui était Laurent Travers en 1997 ?

J’étais juste un dingue de rugby avec beaucoup moins d’expérience et beaucoup plus de cheveux.

A quoi rêviez-vous à l’époque ?

J’étais épanoui dans mon boulot, plutôt heureux dans le monde de la banque. Mais j’avais toujours gardé, dans un coin de la tête, l’ardent désir d’entraîner. Le rugby, j’y suis depuis l’âge de 5 ans. Ce n’est pas qu’un sport, pour moi. Je bois rugby, je mange rugby et je dors rugby. J’ai grandi dans ce milieu-là et me voyais mal en sortir.

Que cherchez-vous en fait ?

L’adrénaline, l’odeur du vestiaire, toutes ces choses avec lesquelles je n’ai jamais voulu couper, une fois ma carrière de joueur terminée. Je suis un compétiteur et quand j’étais en banquier, je voulais aussi être le premier. J’ai ça en moi. J’aime me mesurer aux meilleurs. J’aime combattre.

Que vous reste-t-il du titre de 1997, justement obtenu contre Leicester (28-9) ?

L’essai de Sébastien Viars me revient en mémoire. Il est mis dans l’intervalle par Alain Penaud, accélère, place un premier raffût sur Neil Back, un deuxième sur l’ailier (Austin Healey) et marque. J’ai compris, à cet instant, que le match ne pouvait plus nous échapper… En 1997, tout avait été fait pour gagner ce titre. Nous voulions aller au même endroit, au même moment.

Et puis ?

Quand je dis aux joueurs que « ces trucs-là restent à vie », ce n’est pas du flan. Deux décennies plus tard, les gens nous parlent encore du titre briviste. Entre nous, il y a aussi eu le repas des cinq ans, des dix ans puis des quinze ans… Franchement, devenir champion d’Europe en tant qu’entraîneur, vingt ans après l’avoir été en tant que joueur, serait quelque chose d’énorme. Mais si j’y pense trop, je vais tomber.

A quoi ressemblait cette équipe du CAB ?

Pierre Montlaur et Laurent Seigne (le duo d’entraîneurs) avaient construit leur groupe en faisant des paris ; des paris sur François Duboisset (numéro 8), Didier Casadeï ou moi-même… Devant, nous étions tous des revanchards. Personne ne croyait en nous.

On dit pourtant du pack briviste qu’il était un pack de tueurs…

Ce n’est pas faux. Mais nous avions aussi la plus petite première ligne de la compétition. Avec Casa (Casadéï) et Richard (Crespy), nous compensions le manque de puissance par un peu de roublardise et beaucoup de malice.

Quid de la fête qui suivit ?

Elle fut à la hauteur de l’évènement. Le dimanche matin, nous nous sommes aperçus que nous avions perdu le trophée. Il y eut un petit moment de panique : nous devions en effet le présenter à Brive l’après-midi et sur le plateau de « Stade 2 » le soir. Je ne sais plus vraiment comment tout est rentré dans l’ordre. Mais l’histoire s’est bien terminée…

Quel type de talonneur étiez-vous : Camille Chat, Virgile Lacombe ou Dimitri Szarzewski ?

Tous trois sont bien meilleurs que moi mais dans le style, je me rapprocherais plus de Virgile (Lacombe). Je courais et plaquais beaucoup. Je n’avais pas la chance d’avoir physique de Camille (Chat) ou de Dimitri (Szarzewski).

Laurent Labit nous confiait l’an passé que vous avez longtemps porté un slip spécialement dédié à la Coupe d’Europe. Est-ce toujours d’actualité ?

Non. Je l’ai jeté le jour où nous avons perdu contre les Saracens, à Lyon. Mais j’en ai d’autres, hein ! (rires)

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