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Travers sans Labit

Par Marc Duzan
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    Travers sans Labit
Publié le
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Qui est vraiment Laurent Travers ? Et qui était-il, surtout, avant de croiser la route de Laurent Labit ?

Précautionneux, prudent, souvent frileux. En public, Laurent Travers chasse volontiers le naturel, dompte la bête, pèse le moindre de ses mots et veille à ne vexer, froisser ni agacer qui que ce soit. à l’entendre, il n’y avait pas plus d’antagonisme entre le Racing et Montpellier qu’il n’y a aujourd’hui de revanche entre les Ciel et Blanc et l’ASMCA. L’entraîneur des avants du Racing n’est pas « un débutant » : il fait de la « politique » et l’assume sans sourciller, arguant au passage que l’on ne peut plus être naturel devant les caméras, une pointe d’humour ou d’ironie pouvant vraisemblablement déclencher en quelques minutes un ramdam ébouriffant. « Vous avez vos questions, j’ai mes réponses », disait en son temps Georges Marchais à Jean-Pierre Elkabbach. Alors, à chaque fois que vous pensez avoir coincé Travers dans les cordes, il s’en sort par une improbable pirouette, une authentique « tautologie » comme l’avait fait justement remarquer l’an passé un confrère. Laurent, vous avez empêché Benoit Paillaugue de jouer une touche rapidement en quarts de finale ! « Mais pas du tout. Le ballon était injouable. Je vous signale qu’il venait de toucher le pied du kiné ». Et ouais. C’est ballot. Et sinon, la demie ? « Quand vous êtes en demi-finale, vous êtes à 160minutes d’un titre. Quand vous êtes en quarts, vous en êtes à 240 minutes. Il vaut mieux être à 160 qu’à 240. » Ce n’est pas loin d’être profond, ma foi. Et Clermont, ça s’annonce épais ? « C’est effectivement un adversaire redoutable. Mais comme le sont les douze autres équipes de ce championnat. » Laurent Travers, dit Toto, c’est l’anti punchline par définition, le long fleuve tranquille de la décla d’avant-match, la Suisse du rugby pro. «Il déteste les fanfarons, confie Richard Crespy, ancien pilier du CAB. Toto est un campagnard : il en fait plus qu’il n’en dit. » Et pas seulement. « Il a toujours peur que le ciel lui tombe sur la tête, assure Sébastien Viars, l’ami de toujours. Il se met la pression. Il a même besoin de ça pour avancer. Quand il était joueur, il avait déjà un milliard de questions dans la tête : « Serai-je dans le groupe ? Vais-je être titulaire ? Ai-je bien pigé les annonces ? » Il est ainsi, Toto… » Pour réellement connaître le coentraîneur du Racing, il faut donc contourner la muraille qu’il s’est construite au fil du temps et interroger ses proches. Car il existe un Travers sans Labit. Il fut même l’un des derniers pluriactifs du rugby français. Crespy explique : « Laurent a eu des responsabilités très jeune. Au Crédit Agricole de Sarlat, il gérait près de cent personnes. Ses premières méthodes de management, il les a d’ailleurs acquises là-bas. » Sébastien Viars poursuit : « Avant que le rugby ne passe pro, il faisait les allers-retours entre Brive et Sarlat (cinquante kilomètres, une heure de route) pour l’entraînement du midi et celui du soir. C’était un acharné de boulot. » à l’époque où Travers était le talonneur du CAB (champion d’Europe en 1997), il compensait un gabarit modeste par un travail personnel conséquent. Didier Casadéi, l’autre membre de la première ligne corrézienne, se souvient : « Il n’était ni costaud, ni rapide, ni puissant. Moi j’avais les cervicales pourries. Alors, on bossait beaucoup. Surtout Toto. » Il est d’ailleurs encore affûté, n’est-ce pas ? « Il s’entraîne comme un âne », poursuit Casa. « Il fait du cardio et de la muscu plusieurs fois par semaine, sourit Viars. ça lui lave la tronche.»

Clermont, la vieille blessure

Depuis douze ans, on associe systématiquement Travers à Labit, qui l’avait fait venir à Montauban en 2005. Mais avant de croiser la route de l’ancien ouvreur du Castres olympique, avant de sortir l’USM de la mouise et d’être sacré champion de France en 2013, avec le CO, « Toto » connut aussi son lot d’échecs… En 2001, Patrick Wolff, alors président de l’ASM, demande à Sébastien Viars s’il connaît un entraîneur des avants. L’arrière international cite spontanément le nom de Travers, lequel débarque au Michelin dans la foulée. Alexandre Audebert, alors membre de l’ASMCA, se souvient : « La première année s’est très bien passée. Laurent était enthousiaste, pointu sur la mêlée et dingue de touche. On passait des heures à décortiquer les alignements de nos adversaires sur des VHS : retours en arrière, ralentis, pause, lecture… Au départ, il se sentait bien à Clermont et ça se voyait. » Très vite, Laurent Travers était néanmoins appelé à prendre du galon et devenait, aux côtés de l’Australien Steve Nance, le patron sportif des Jaunards. Viars conclut : « Entre eux, ce fut la guerre car la hiérarchie n’était pas claire. Nance était un préparateur physique. Il ne connaissait pas le métier d’entraîneur. Cette année, on a galéré et Toto en a bavé. » Remplacé l’année suivante par Alain Hyardet, Laurent Travers a quitté Clermont particulièrement meurtri. Après une traversée du désert ayant duré deux ans, il a reçu un appel dudit « Lolo ». Ces deux-là ne se sont plus jamais quittés…

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