Baky écrit : quand les quotas s'invitent dans le sport

Par Rugbyrama
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BAKY ÉCRIT - Tout jeune retraité, Bakary Meité profite de sa liberté retrouvée pour intégrer l’équipe des chroniqueurs Midi Olympique. L’ancien troisième ligne a tout connu du rugby, d’abord amateur et finalement professionnel. Pour Rugbyrama, l’ancien international ivoirien va désormais s’attacher à poser un regard libre, décalé et forcément engagé sur l’actualité du rugby. Welcome "Baky".

Dans le monde du sport, il y a des athlètes qui transcendent leur discipline. Siya Kolisi est l’un d’eux. Le premier capitaine noir de l’équipe sud-africaine de rugby, championne du monde en titre, s’est déclaré contre les quotas, depuis longtemps maintenant. Il a affirmé vouloir être sélectionné pour ses qualités de joueur et non pour sa couleur de peau. Se réclamant même du grand Madiba : "Je pense que Mandela n’aurait pas approuvé les quotas (…)" Une position vivement critiquée à l’époque, sur les réseaux sociaux et par une partie de l’échiquier politique local.

Ne se démontant pas, il ira même jusqu’à expliquer que s’il n’avait pas eu accès a une scolarité réservée majoritairement aux blancs, il n’aurait pas eu le même développement physique. Parce que le régime alimentaire des townships de Port-Elizabeth n’a pas grand-chose à voir avec celui de l’école Grey Junior situé 15 kilomètres plus au sud. Il n’y a pas "officiellement" de politique de quotas pour l’équipe nationale sud-africaine qui affrontera le pays de Galles, samedi à Cardiff. Sous la pression de politiques aux visées électoralistes et populistes, la fédération a régulièrement tenté d’en imposer. On se souvient qu’en 2019, Rassie Erasmus avait été sommé d’emmener 50% de joueurs non blancs dans son squad pour la Coupe du monde au Japon. Il n’en fera rien et sera même sacré champion du monde quelques semaines plus tard.

En revanche, concernant les provinces, la réalité semble être tout autre. Dans le cadre de mon activité professionnelle auprès d’une société d’agent de joueurs, j’ai pu me rendre compte de la réalité du terrain.

Prenons l’exemple d’un joueur noir qui joue pour une province sud-africaine et qui souhaite venir jouer en Europe. Sa province exigera de son agent de lui trouver un remplaçant qui partage la même mélanine que lui. Au détriment même des qualités rugbystiques. Pis encore, même le poste occupé n’est pas prioritaire ! Comprenez : Je perds un deuxième ligne noir dans mon effectif, il faut le remplacer par un noir, si c’est un deuxième ligne c’est bien, s’il est talonneur on s’en accommodera. Autrement dit, pourvu que cela n’impacte pas la ligne du nombre de joueurs noirs dans le tableau Excel prévu à cet effet…

Autre exemple, le nombre de joueurs blancs obligés de s’exiler dans des championnats "exotiques" que seraient le championnat néerlandais ou polonais par exemple (doux renversement des valeurs que de constater que la Pologne est dans le cas présent la destination exotique). Ces joueurs renouent parfois avec des racines lointaines. Cela leur permet d’être éligible pour la sélection et de devenir des joueurs allogènes. Et ainsi prendre la place a des joueurs authigènes. L’effet papillon de cette politique de quotas prônée a des milliers de kilomètres de là…

Vous l’aurez compris, cette conception ne trouve pas grâce à mes yeux. Elle va à l’encontre même de l’idée de performance sportive. Elle pourrait, si elle venait à être officialisée, devenir à moyen terme le fossoyeur du rugby sud-africain. Quand on sait que l’Afrique du Sud est probablement la seule nation du rugby mondiale en mesure de battre régulièrement les All Blacks, c’est un augure qu’on ne souhaiterait pas voir se concrétiser. Ces derniers justement, au même titre que l’autre nation du Sud, l’Australie, gèrent tout autrement la question des minorités dans le sport, en permettant respectivement l’émergence d’équipes tels que les Maori All Blacks ou des "Indigenous All Stars" pour nos cousins treizistes.

Le poids de l’apartheid est encore à supporter pour les athlètes de la nation arc en ciel me direz-vous. Espérons simplement que des joueurs de la trempe de Kolisi puissent sortir des townships de plus en plus nombreux.

En Bref :

Béziers - Narbonne ce vendredi. Le seul match qui pourrait me donner envie de reprendre le rugby.

Les Barbarians ont enfin une équipe féminine.

Le Stade du Saut-du-Loup (à Boulogne-Billancourt), lieu d’entrainement du Stade français a été rebaptisé stade Christophe Dominici.

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