Lancaster : "Gaël Fickou m'a brisé le coeur"

  • United Rugby Championship - Stuart Lancaster (Leinster)
    United Rugby Championship - Stuart Lancaster (Leinster)
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CHAMPIONS CUP - En juillet prochain, Stuart Lancaster (52 ans) sera le patron sportif du Racing 92, prochain adversaire du Leinster en Champions Cup. Comment vit-il cette situation ? Quelle est sa philosophie de jeu ? Et que souhaite-t-il amener, dans quelques mois, au club francilien ? Pour nous, l’ancien sélectionneur de l’équipe d’Angleterre se livre…

A quoi vous attendez-vous face au Racing, samedi après-midi ?

Le Racing est très impressionnant, en ce moment : facile vainqueur de Toulon, deuxième du championnat et souvent dominant dans le combat d’avants… Au Leinster, nous avons tous conscience à quel point cette équipe est une menace.

Quelles sont les qualités du Racing ?

Son alignement en touche est l’un des meilleurs en Europe. Quant à son panel offensif, il est très large, très varié. Laurent Travers a créé un bon environnement. C’est vraiment du bon boulot.

Ce match sera-t-il bizarre, pour vous ?

Non. Ma mission au Racing commencera en juillet prochain. D’ici là, je suis dévoué au Leinster et je ferai tout pour mener cette équipe jusqu’à la finale de Dublin, au printemps prochain.

En United Rugby Championship, vous avez souvent affronté les provinces sud-africaines. A quel point sont-elles efficaces ?

Ouf… Je pense que les équipes françaises et anglaises vont être surprises quand elles vont découvrir la force et la qualité des franchises sud-africaines. Elles sont puissantes, joueuses et surtout très fières : elles veulent faire de la Champions Cup leur nouveau territoire. Et puis, elles sont désormais habituées à voyager entre les deux hémisphères pour disputer des matchs : les équipes du Top 14 et du Premiership devront, elles, s’adapter à cette nouvelle logistique, à ces déplacements d’une semaine et aussi au fait de jongler entre deux météos parfois totalement opposées…

Quand arriverez-vous au Havre ?

Nous serons là vendredi.

Sexton pourra-t-il jouer ?

Johnny Sexton est toujours convalescent mais a repris la course cette semaine. S’il n’est pas prêt, Ross Byrne (un autre international irlandais) occupera le poste. C’est un très bon ouvreur. J’ai confiance en lui.

Pourquoi avez-vous choisi de signer au Racing, il y a quelques mois ?

Je voulais me tester et me frotter au Top 14. Le Racing est un grand club du rugby européen. Les gens qui l’ont construit ont fait un boulot remarquable. La responsabilité de le rendre encore plus performant est donc pour moi immense. Laurent (Travers) et Jacky (Lorenzetti) m’ont donné leur confiance et je voudrai leur rendre du mieux que je peux. Quand ils m’ont contacté, mon instinct m’a immédiatement conseillé de les suivre.

Aviez-vous d’autres options ?

Oui, quelques-unes. Mais je voulais vraiment découvrir le Top 14. […] En United Rugby Championship, j’affronte des pays différents et de nouveaux styles de jeu tous les week-ends : gallois, italiens, écossais, sud-africains… Je dois m’adapter toutes les semaines. La France m’offrira quelque chose de fondamentalement différent et ça me plaît.

Vous rappelez-vous de la première fois où vous avez rencontré les dirigeants franciliens ?

La première fois, c’était en 2016. A l’époque, Laurent Travers et Laurent Labit entraînaient encore ensemble. Ils avaient eu la gentillesse de m’inviter visiter leurs installations, d’assister à leurs séances d’entraînement. Je n’ai jamais oublié cette main tendue.

A la tête du Leinster, vous avez battu le Racing en finale de coupe d’Europe, en 2018. Que vous souvenez-vous de ce match ?

C’était âpre, difficile, acharné... Cette finale s’est vraiment jouée sur rien : sur la dernière action, les Racingmen auraient même pu l’emporter sur un drop (de Rémi Talès)… Je sais, depuis, à quel point cette compétition est importante à leurs yeux . Et c’est la raison pour laquelle nous devrons jouer notre meilleur rugby, samedi.

Que souhaitez-vous amener à cette équipe ?

Après avoir dirigé l’Angleterre à cinquante reprises (de 2011 à 2015) puis le Leinster pendant six ans, je pense avoir un peu d’expérience. Mais ce que je souhaite, surtout, c’est de poursuivre le chemin entrepris par le club au niveau de la formation. C’est à ce poste que j’ai intégré en 2008 la RFU (fédération anglaise) : découvrir de nouveaux talents, former des joueurs, c’est le sens premier de notre job d’entraîneur. Je ne serai pas au Racing pour gérer des internationaux.

Quel style de rugby appréciez-vous ?

Regardez comment joue le Leinster et vous saurez ! (rires) A Dublin, on essaie de pratiquer un jeu excitant, offensif tout en nous appuyant, en parallèle, sur une défense très agressive, très organisée.

Vous occupez-vous déjà du recrutement du Racing ?

Mon job au quotidien est d’entraîner le Leinster. Mais je suis en contacts avec Laurent Travers tous les jours, oui.

Garderez-vous Finn Russell ?

Il a fait un excellent début de saison, que ce soit sous le maillot du Racing ou avec la sélection écossaise. Nous tenterons évidemment de conserver tous les meilleurs joueurs du club.

Comment est votre français ?

Mieux ! Je prends des cours tous les soirs. Mais apprendre une langue nouvelle à mon âge, en "zoom", c’est complexe… J’imagine que tout sera plus simple quand je serai immergé dans un environnement totalement français.

Est-il envisageable que Tom Whitford, l’actuel team manager anglais de Montpellier, vous rejoigne pour vous faciliter la tâche, au départ ?

On verra. Beaucoup de gens parlent très bien l’Anglais au Racing : il y a Yannick (Nyanga), Teddy (Boutayacht, le team manager)… Finn Russell pourra m’aider, lui-aussi. Je serai très bien entouré. Je ne suis pas du tout inquiet.

Que s’est-il passé avec Thibault Giroud, le directeur de la performance du XV de France ? Pourquoi n’avez-vous pas trouvé un terrain d’entente, tous les deux ?

J’ai beaucoup apprécié échanger avec Thibault. J’ai du respect pour l’homme, du respect pour le travail qu’il réalise avec l’équipe de France. Mais nos philosophies étaient simplement différentes, que ce soit au niveau de l’entraînement, des semaines de préparation…

Est-il envisageable que le Gallois Paul Stridgeon, en charge du XV du Poireau, vous rejoigne au Racing en tant que préparateur physique ?

Oui, c’est possible. Il y a également d’autres options. Les candidats ne manquent pas, dès qu’il est question du Racing.

En 2015, après l’élimination de l’Angleterre en Coupe du monde, vous avez été écarté du XV de la Rose. A quel point cette expérience a-t-elle été difficile à vivre, pour vous ?

Le problème, c’est que les gens ne se souviennent que de la fin… Avec Andy Farrell, Graham Rowntree et Mike Catt, nous avons pourtant fait de très belles choses à la tête de cette équipe, pendant quatre ans. Nous avions hérité, en 2012, d’une très jeune équipe, dépourvue d’expérience au niveau international. On a essayé de créer un environnement favorable, de développer un jeu rapide, excitant. Je compare d’ailleurs souvent cette situation avec ce qu’a connu Fabien Galthié à son arrivée à la tête de l’équipe de France, en 2020.

On vous suit.

J’ai gardé quelques moments merveilleux de cette aventure à la tête de l’équipe d’Angleterre. D’autres furent aussi plus difficiles : en 2014, quand Gaël Fickou a marqué l’essai de victoire des Bleus au Stade de France sur la dernière action, il m’a brisé le coeur. On en parlera tous les deux, un jour... (rires)

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