La chronique de Rodolphe Rolland

Par Rugbyrama
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Notre chroniqueur Rodolphe Rolland évoque cette semaine les déclarations de Marc Lièvremont concernant les joueurs de l'équipe de France.

Pas toujours facile à suivre Marc Lièvremont !

A la recherche d'un équilibre qui se dérobe : avants-trois quarts, jeu au pied-jeu à la main, anciens-nouveaux... Bref, le sélectionneur de l'équipe de France ne cesse de surprendre, de dérouter quitte à s'aliéner médias et anciennes gloires de l'ovale s'interrogeant, à juste titre, sur le jusqu'au-boutisme de sa logique.

Pas facile à suivre sur les compositions d'équipe, sur l'absence d'un buteur notoire dicté par la nébuleuse d'un soi-disant contexte conçu stricto sensu pour éviter de froisser les susceptibilités, pas facile à suivre sur les options stratégiques de la tournée de l'automne dernier où après un Tournoi des VI Nations 2008 faisant la par belle au "tout à la main", le mot d'ordre était minimalisme à tous les étages, minimalisme salué en ces termes par Bernard Laporte : "Je ne me souviens pas que nous ayons joué autant au pied que ce que j'ai vu lors des trois derniers matchs..."

De charnières expérimentales en charnières expérimentales, Lièvremont suit les traces de son prédécesseur avec la même fortune – du moins à ses débuts. Lui l'ancien joueur parachuté là au gré d'un large consensus Lapasset-Camou soutenu par la DTN, chargé de se débarrasser d'un héritage Laporte post Coupe du Monde devenu trop embarrassant pour la quiétude moelleuse de la rue de Liège, a du mal à se défaire totalement de l'ombre de son aîné.

Serait-ce pour cette raison qu'il semble sacrifier la "génération Laporte" des Skrela, Elissalde, Mignoni, Thion, Martin et consorts ? Serait-ce pour cette raison qu'il s'appuie sur Lionel Nallet, le grand déçu de 2007, en choisissant l'homme pour capitaine ?

Pendant que Pierre Camou, faisant l'autruche, ânonne l'antienne fantaisiste de l'obscur objectif 2011, fantasmagorie sanctifiée par la "jacque(t)rie" des footballeurs de 1998 – qui soit dit en passant frôla la déconfiture face à l'Italie et face au Paraguay –, pendant qu'on nous emberlificote le présent avec cette formule éculée et falsificatrice d'une préparation sur quatre ans – credo de Laporte pour 2003 et 2007 avec la réussite qu'on lui connaît –, Lièvremont, lui, poursuit son art du contre-pied.

Protecteur hier, il n'hésite pas aujourd'hui à distribuer bons points et blâmes à ses joueurs au sortir d'un Tournoi qui aura vue la France se saisir d'une huitième place IRB très convoitée. Ainsi, l'on apprend par voie de presse que Florian Fritz a déçu, que les trentenaires Elissalde et Skrela sont quasi en préretraite, que Thion pourra prendre ses vacances au mois de juin et qu'il ne sait que faire de Frédéric Michalak. Marc Lièvremont branché comme son équipe sur le courant alternatif ? On l'avait connu plus élégant en tout cas.

Dans le staff du Stade toulousain, où Guy Novès trône en vizir, les propos du sélectionneur ont fait mouche. Novès, ce "maître-étalon" de la polémique, "père-ma-querelle" endurci a déjà tiré une première salve : "Ce n'est pas le moment de polémiquer mais si les joueurs toulousains ne sont pas bons en équipe de France, ils le sont chez nous. Regardez Jauzion qui a été tant critiqué et qui brille avec nous... J'ai une explication : cela fait quinze ans que nous nous tenons à Toulouse à un système de jeu. En équipe de France, ils en ont changé deux ou trois fois en un an et demi...".

Nul doute qu'il se servira encore des propos du sélectionneur pour motiver ses sbires si le besoin s'en fait sentir avant la rencontre de H Cup à Cardiff.

Et Fred Michalak, "l'homme aux semelles de vent", génie précoce damné à la Rimbaud, l'exilé des sélections au grand dam de Richard Escot ?

"On n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans" disait le poète ; est-on vraiment fini, sportivement parlant, quand on en a trente ? That's the question !

La réponse personne ne l'a, pas même Marc Lièvremont, Lièvremont dont Lao-Tseu aura anticipé le portrait dans son Tao-tö King:

"Mes préceptes sont très faciles à comprendreet très faciles à pratiquer.Mais nul ne peut les comprendre ni les pratiquer.Mes préceptes ont leur principe,mon action a sa direction.Mais nul ne les comprendet je reste inconnu du monde."

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