Bayonne : défense de passer

  • Pro D2 - Romain Barthelemy (Bayonne) contre Colomiers
    Pro D2 - Romain Barthelemy (Bayonne) contre Colomiers
  • Yannick Bru (Bayonne)
    Yannick Bru (Bayonne)
  • Pro D2 - Eric Artiguste (Colomiers)
    Pro D2 - Eric Artiguste (Colomiers)
Publié le Mis à jour
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PRO D2 - Avec 233 points encaissés depuis le début de la saison, l’Aviron occupe la première place du classement des défenses. Une nouveauté, dans le club, en partie due à une prise de conscience générale.

L’Aviron Bayonnais s’est imposé vendredi dernier, au terme d’un match âpre à Colomiers, 6-0. Si ce n’était pas le premier succès des ciel et blanc à l’extérieur, c’était la première fois qu’ils gagnaient loin de Jean-Dauger sans encaisser de point.

Lorsqu’on se plonge dans les chiffres et les archives, on remarque que sur les treize dernières années, jamais les Basques ne s’étaient imposés en championnat à l’extérieur sans prendre de point. À domicile, sur cette même période, on retrouve quatre victoires avec un zéro pointé pour l’équipe adverse : contre Narbonne en 2017 (53-0), Agen (27-0) et Biarritz (15-0) en 2010, puis Dax (27-0) en 2007. Pour voir Bayonne l’emporter à l’extérieur sans encaisser de point, il faut se tourner vers le Challenge Européen avec un succès plutôt récent qui date de 2015 à La Rochelle 14-0. Le site AllRugby rappelle, de son côté, que les ciel et blanc avaient gagné 54-0 contre la formation italienne de Mogliano en 2013.

Plus qu’un exploit, cette victoire 6-0 à Colomiers est une confirmation quant à la qualité du système défensif Bayonnais. Catastrophique il y a deux ans en Top 14 (905 points pris dont 107 essais), un brin mieux l’an dernier, et encore (764 points pris, treizième de Pro D2 dans ce secteur), sa progression se mesure de façon exponentielle. Grâce à qui, grâce à quoi ?

Un nouveau staff

Dès son arrivée cet été, Yannick Bru n’a pas tardé à présenter ses attentes. "Je veux que l’on soit bon sur ce qui ne demande pas de talent" expliquait-il alors.

L’ancien adjoint de Guy Novès à la tête du XV de France avait également souhaité s’entourer d’un nouveau staff, plus étoffé que le précédent. Force est de constater que, pour l’instant, les résultats sont probants. Et que le travail de Ludovic Loustau, le préparateur physique, a clairement permis aux ciel et blanc de progresser dans la dimension physique et donc, d’être plus actifs sur le terrain. Dans le jeu avec ballon, comme sans.

Yannick Bru (Bayonne)
Yannick Bru (Bayonne)

Éric Artiguste, qui officiait jusque-là avec les espoirs du Stade Toulouain a endossé la casquette de consultant sur la défense. "Quand je suis arrivé, Yannick m’a demandé de mettre en place un système de circulation, mais surtout que les joueurs montent fort pour chercher les mecs pour presser les équipes adverses explique l’ancien centre. Ça, on peut le faire, mais si tu n’as pas une grosse caisse, ce n’est pas possible. Aujourd’hui, on se rend compte qu’on est vite debout, qu’on circule vite, ça bouge. Ça veut dire que les mecs, physiquement, sont prêts."

Une prise de conscience

Plus globalement, c’est un véritable nouvel état d’esprit qu’a voulu insuffler le staff Bayonnais. Jusque-là, la défense n’était pas forcément la priorité. Non pas qu’elle était délaissée, mais les chiffres parlent d’eux-mêmes : Bayonne avait de sérieux problèmes dans ce domaine.

Lorsqu’on lui demande quelle image avait-il de l’Aviron, Benjamin Collet, arrivé à l’intersaison en provenance de Narbonne, se souvient : "d’une équipe qui préférait attaquer plutôt que défendre." Les habitudes ont donc changé, dès cet été. "On voyait que c’était une volonté des joueurs déjà en place aussi, poursuit Collet. Tout le monde voulait changer cette image de l’Aviron, plus portée sur l’attaque. Il a fallu bien travailler, c’est ce qu’on a fait et, pour l’instant, ça paye."

L’investissement et la mentalité inculqués cette saison sur les bords de l'Adour sont donc les premiers garants de cette réussite. "La base du truc, c’est la solidarité entre chacun des acteurs de ce système" confirme le troisième ligne aile.

La rotation et une confiance engrangée

Logiquement, l’émulation amenée par une rotation très importante de l’effectif ciel et blanc pousse aussi chaque joueur à se surpasser tout en amenant de la fraîcheur : "Ce que je trouve hyper positif, c’est l’état d’esprit des mecs. Ils se challengent, note Artiguste. Quand tu es un peu en haut, tu as envie d’y rester, donc tu te bats ! On a beaucoup d’exemples où ils défendent près de la ligne, on leur demander d’avoir des attitudes, et souvent ça paye. À un moment donné, tu ne leur dis plus, ils comprennent tout seuls."

Au niveau de la confiance, il fallait retrouver quelque chose

En termes d’automatismes, il a fallu que les rouages se fassent. Sur le premier bloc, Bayonne a encaissé 75 points. Sur le second, le moins bon, 84. Enfin, sur le troisième 60 et donc, depuis le début du quatrième, 14. Même s’il est plus facile, pour l’équipe en face, de produire du jeu sur un terrain sec à l’automne que sur une pelouse grasse et détrempée en hiver, les progrès sont là. "Au niveau de la confiance, il fallait retrouver quelque chose souligne le natif de Lourdes. Ce qui me plaît aujourd'hui dans l’équipe, c’est qu’il arrive qu’un mec manque un plaquage. Mais quand c’est le cas, il y en a quatorze qui se battent pour le rattraper. C’est ça qui est hyper important."

L’importance de la communication

Lorsqu'on interroge Artiguste sur l’aspect technique, il rappelle : "Ce n’est pas comme jouer un deux contre un ou faire une passe croisée. C’est être volontaire, courageux et un peu organisé. Sur notre organisation, quatre joueurs sont censés regarder le ballon et le reste doit regarder en face ce qu’il se passe. Tout le monde sait plus ou moins plaquer, engager une épaule. Il faut beaucoup parler, regarder ce qu’il se passe en face, circuler. Là, on est pénibles, même sur les entraînements. Quand tu parles avec un mec en face de toi, tu le perturbes en criant "je l’ai". On se bat sur ça. Sur les premiers matchs, il y avait souvent des erreurs parce que ça ne parlait pas. Tout est fragile, mais aujourd’hui, on se sent un peu fort, même s’il faut faire attention."

Pro D2 - Eric Artiguste (Colomiers)
Pro D2 - Eric Artiguste (Colomiers)

Et comme l’appétit vient en mangeant, les Bayonnais ont naturellement pris goût et plaisir à défendre, récupérer des munitions et contre-attaquer. "Ce sont les meilleurs ballons" savoure le spécialiste.

Toutefois, ce dernier reste prudent : "Ça peut aller très vite. Il faut rester humble et simple. Ça va vite dans un sens comme dans l’autre." Néanmoins, Bayonne ne peut pas se cacher. Aujourd’hui, son rideau défensif est devenu sa meilleure arme.

Par Pablo Ordas

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