Blessures et dépression : l'ancien All Black Richard Kahui raconte sa descente aux enfers

  • Richard Kahui
    Richard Kahui
  • Coupe du monde 2011 - Richard Kahui (Nouvelle-Zélande) soulevant la coupe Webb Ellis
    Coupe du monde 2011 - Richard Kahui (Nouvelle-Zélande) soulevant la coupe Webb Ellis
  • Richard KAHUI / Jaco PRETORIUS
    Richard KAHUI / Jaco PRETORIUS
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SUPER RUGBY - De retour en Super Rugby, où il défendra prochainement les couleurs de la Western Force (Australie) après sept années dans un relatif anonymat au Japon, l'ancien champion du monde All Black Richard Kahui a un temps sombré, miné par les blessures. Il raconte.

A la postérité, Richard Kahui ne restera pas comme le nom le plus ronflant de l'histoire des All Blacks. En 2011, pourtant, quand les Néo-Zélandais battaient d'un cheveu les Bleus en finale de la Coupe du monde, Kahui en était un titulaire, à l'aile, en vis-à-vis de Vincent Clerc. Ce sacre planétaire serait aussi sa dix-septième et dernière sélection avec la tunique noire, à seulement 26 ans.

Que s'est-il passé, ensuite ? Six graves blessures, toutes à la même épaule, auront eu raison de son destin international. Une fragilité qui n'avait pas attendu le Mondial 2011. "La troisième fois que je me suis blessé à l'épaule, c'était en 2010. C'est à ce moment-là que je suis probablement tombé dans la déprime, sans aucun diagnostic clinique toutefois" raconte-t-il aujourd'hui au site RugbyPass.

Coupe du monde 2011 - Richard Kahui (Nouvelle-Zélande) soulevant la coupe Webb Ellis
Coupe du monde 2011 - Richard Kahui (Nouvelle-Zélande) soulevant la coupe Webb Ellis

Pour un rugbyman comme pour tout sportif, dont le corps est l'outil-machine, la récurrence d'une blessure devient vite un fardeau. "J'ai toujours voulu être un All Black. Je ne voulais que cela. À trois ou quatre ans, je faisais le haka devant la télé. Quand j'y suis enfin parvenu, j'étais le plus heureux des hommes. Mais soudain, tout disparaît. La blessure vous enlève tout cela. Vous ne jouez plus, vous ne voyagez plus, vous ne vous entraînez plus avec l'équipe. Vous ne faites plus vraiment partie de l'équipe, en fait." Kahui raconte alors avoir sombré, psychologiquement. "A moins de 500m de chez moi, il y avait un pub. Pendant un temps, j'y allais tous les jours. Je restais là toute la journée, avec un pichet de bière, à discuter avec les habitués. On jouait au billard. Je n'avais plus aucune motivation."

Pour revenir au plus haut niveau et disputer le Mondial 2011, Kahui a d'abord accepté l'aide de ses proches. "Un jour j'ai dit à un ami, Nigel Williams, de venir avec moi au bar. "Mon pote, qu'est-ce que tu fous? Ça ne va pas ? Il faut que tu sortes de là !" Nous sommes restés là à discuter, pendant un long moment, sur ce que je faisais de ma vie. J'étais sur une voie toxique, autant pour ma vie d'homme que ma vie de joueur. Émotionnellement, Nigel m'a fait changer de voie."

Il m'a fallu deux ans pour réellement tourner la page de ces blessures

Finalement sélectionné, titulaire et champion du monde en 2011, Kahui pensait avoir laissé ces années sombres derrière lui. Ensuite, il rechute pourtant. Trois nouvelles blessures, toujours à la même épaule. En 2012, il est blessé depuis de longs mois lorsque les Chiefs, sa franchise, décrochent le premier sacre de leur histoire en Super Rugby. C'était la cinquième fois, encore à la même épaule. "A ce moment-là, j'étais vraiment prêt à tout abandonner" poursuit Kahui à RugbyPass. "J'étais assis là, seul dans les vestiaires. Je me souviens juste avoir pleuré, en me disant que je ne pouvais plus le supporter. Je ne pouvais plus encaisser ce stress émotionnel, toute cette déception."

Pour Kahui, direction le Japon et les Toshiba Brave Lupus. Pour se reconstruire, mentalement et physiquement, dans un rugby moins exigeant. "Il m'a fallu deux ans pour réellement tourner la page de ces blessures. Pour ne plus me dire, à chaque douleur : "merde, ça recommence !". Au Japon, Kahui y resta finalement sept ans.

A 35 ans, apaisé, il s'apprête désormais à retrouver le Super Rugby, au printemps prochain, avec la Western Force (Australie) pour laquelle il vient de s'engager. "J'ai vieilli, c'est sûr. Je vais certainement un peu moins vite, je suis certainement un peu moins fort. Mais je suis tout de même en bonne forme. Que ce soit en salle ou sur le terrain, mes performances physiques sont tout de même encore bonnes. Désormais, il me faudra simplement un peu de temps pour me réadapter au rythme du Super rugby." Et conclure, dans la paix, une carrière tout de même exceptionnelle.

Richard KAHUI / Jaco PRETORIUS
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