Les pieds d’or

Un chiffre résume parfaitement la prédominance de ce domaine dans le rugby pratiqué par les hommes de Vern Cotter : 29. Le nombre de ballons joués au pied par les Héraultais en demi-finale. Soit 41% de la totalité des munitions qu’ils ont eu à exploiter face à Lou vendredi dernier (71 passes à la main). Là où les Rhodaniens dépassaient eux à peine les 15% (109 passes à la main ; 17 au pied)… Et pourtant à l’arrivée, l’équipe la plus "joueuse", Lyon, n’a marqué qu’un essai contre quatre encaissés. Elle est aussi apparue constamment sous pression, déstructurée dans son jeu offensif devenu "impuissant" et a été au final sèchement battue (40-14).

La faute notamment, à la tactique des Cistes parfaitement maîtrisée selon le deuxième ligne rhodanien Félix Lambey : "Montpellier peut s’appuyer sur plusieurs joueurs qui sont très forts au pied. Pienaar a été redoutable face à nous, il est hors-normes. Mais il n’y a pas que lui car le MHR a un dix (Cruden, NDLR), un quinze (Mogg) et un centre (Steyn) qui mettent le ballon où ils veulent sur le terrain. Dès qu’il y a un temps de jeu où ils n’avancent pas trop, derrière ils nous ramènent dans notre camp à cinq mètres de notre ligne par du jeu au pied. C’est dur, car on ne souffle jamais."

Epuiser l’adversaire en lui faisant visiter les quatre coins du terrain par du jeu au pied de déplacement et le forcer à jouer dans son camp grâce à du jeu au pied de pression, pour qu’il s’expose et se face contrer. Une stratégie simple mais tellement efficace quand elle est ainsi récitée à la perfection.

Six spécialistes sur sept chez les trois-quarts

"Le système de jeu du MHR est assez simple cette année mais redoutable. Cette équipe utilise beaucoup le jeu au pied long pour maintenir l’adversaire dans son camp et ne joue ainsi que très rarement chez lui. Et ils sont aussi très performants sur le jeu au pied offensif où ils ont énormément de solutions", explique Manny Edmonds, entraîneur des trois-quarts de Toulon. La liste des pieds d’or de Montpellier est longue. C’est d’ailleurs aujourd’hui la seule équipe du Top14 a pouvoir s’appuyer sur des artilleurs à (presque) tous les postes derrière.

A la charnière avec Ruan Pienaar et Aaron Cruden, au centre avec François Steyn mais aussi sur les ailes avec Nemani Nadolo ou Benjamin Fall. Et que dire de la "patte" de l’arrière Jesse Mogg, dont les deux "missiles" face au Lou de cinquante mètres, ont ramené les Rouge et Noir à cinq mètres de leur ligne alors qu’ils occupaient le camp héraultais… Ou encore du remplaçant Henry Immelman, lui aussi très à l’aise dans ce domaine.

Des pieds d’or très complémentaires, dans lesquels se mêlent longueur et précision extrêmes. Redoutables en attaque, à l’image du jeu au pied à suivre de Pienaar pour Mogg face au Lou, qui amena le premier essai de Nemani Nadolo suite à un contre-ruck gagnant. Une stratégie déjà très utilisée cette saison, à l’image des diagonales au pied trouvées par Aaron Cruden (ou Pienaar) pour Nadolo, Steyn et Fall, qui ont été à l’origine de plusieurs autres réalisations cette saison…

Atout très utilisé dans le jeu courant, les "pieds" d’or des buteurs Ruan Pienaar (100% face au Lou, 17 points) et François Steyn (trois points passés de plus de cinquante mètres) sont très précieux au MHR. Les deux Sud-Africains, excellents de près (Pienaar) et de loin (Steyn) et sanctionnent ainsi chaque écart de conduite de leurs concurrents. Castres (27% de ballons joués au pied face au Racing92) est prévenu : Montpellier va miser sur cette force affichée pour remporter son premier sacre nationale : "Et d’ailleurs, je pense que cette rencontre va se jouer sur le jeu au pied, très utilisé par les deux équipes. Celle qui maîtrisera le mieux sa tactique dans ce domaine gagnera", conclut Edmonds.