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XV de France - Patrice Collazo : « Nos adversaires doivent mal dormir la veille des matchs »

  • Patrice collazo (Ancien entraîneur de La Rochelle et de Toulon).
    Patrice collazo (Ancien entraîneur de La Rochelle et de Toulon). Icon Sport - Icon Sport
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Le technicien passé notamment par La Rochelle et Toulon pose son regard avisé sur la tournée de novembre du XV de France et notamment sur son paquet d’avants, qu’il juge magnifique de polyvalence et de puissance physique.

Durant cette fenêtre internationale, l’équipe de France va se frotter à trois équipes aux styles de jeu bien différents…

Oui, cette tournée de novembre va offrir aux Français trois belles oppositions pour continuer la montée en puissance vers la Coupe du monde. L’Australie sort d’un Rugby Championship difficile. J’ai vu une équipe qui se cherche, qui a dû rappeler des anciens et qui est minée par des problèmes de charnière, notamment au poste de numéro 10. Je n’ai pas l’impression que l’Australie ait beaucoup progressé sur les phases de conquête statiques. Bon, comme toujours, ils seront à la lutte pour être champions du monde dans un an mais pour les Bleus, le vrai test aura lieu la semaine suivante face à l’Afrique du Sud, la seule équipe que la France de l’ère Galthié n’a jamais rencontrée.

En quoi le match contre les Springboks est-il si important pour les hommes de Fabien Galthié ?

L’Afrique du Sud offre un profil d’équipe que nos jeunes Français n’ont encore jamais croisé. Une équipe au jeu très hermétique, très frontal, basé sur une densité physique incroyable appliquée avec méthode pendant quatre-vingts minutes. Les Boks n’ont pas de plan « B », ils savent seulement vous rentrer dedans pour vous détruire. Ce match aura vraiment valeur de test. Et quand ce test sera passé, les Bleus auront toutes les cartes en mains pour affiner leur préparation. Ils auront alors rencontré tout ce qui se fait de mieux sur la planète rugby et sauront exactement où ils en sont à l’instant T. Néanmoins, selon moi, le pack des Bleus a, à ce jour, un temps d’avance sur ceux des autres nations…

C’est-à-dire ?

Fabien Galthié a construit un pack hyperpolyvalent que nous sommes les seuls à avoir. Julien Marchand est talonneur mais a une activité de gratteur dans les rucks digne d’un troisième ligne, ce qui contribue notamment à permettre à Cameron Woki de pouvoir monter dans la cage pour former une paire complémentaire avec un joueur de fort tonnage, tel que Romain Taofifenua ou Paul Willemse, qui sera malheureusement absent lors de l’ouverture de cette tournée. Les Bleus peuvent se permettre de faire monter un gars comme Cameron en deuxième ligne car on a à côté de lui des morphotypes que nous sommes les seuls à avoir au niveau international. Des deuxième ligne de 125 ou 130 kg qui ont l’activité d’un Paul Willemse, il n’y en a pas d’autres. Derrière un axe droit comme le nôtre, vous pouvez vous permettre de mettre un profil hybride « coureur-athlétique » qui va amener d’autres nuances à la palette du jeu français. Dans l’absolu, Charles Ollivon pourrait même jouer en deuxième ligne, comme je l’ai déjà utilisé en club. Cette polyvalence, pour moi, symbolise aujourd’hui le temps d’avance dont disposent les Français sur les autres nations…

On peut jouer avec une troisième ligne qui compte trois numéros 8 interchangeables (Jelonch - Alldritt - Ollivon). Les Bleus disposent de porteurs de balle à chaque poste du pack. C’est solide, ça gagne des duels et la ligne d’avantage. Le staff a eu l’intelligence de ne pas enfermer les joueurs dans le poste dans lequel ils évoluent en club. Ils ont pris le meilleur de leur compétence et les utilisent au poste où ces compétences sont le mieux mises en valeur. Le pack français est un assemblage réfléchi avec les meilleures qualités de chacun. On sent que la réflexion du staff est profonde et qu’elle part de loin. Tout cela ne s’est pas bâti en un jour. Les autres équipes, elles, sont selon moi restées dans des schémas plus traditionnels.

Le début de saison de Cameron Woki en Top 14 est jugé décevant. Qu’en pensez-vous ?

Juger Cameron Woki sur ses performances lors de ses premières semaines dans son nouveau club est un peu réducteur. Il faut lui laisser le temps de s’acclimater à son nouveau club, son nouvel environnement. Ce n’est jamais évident de changer de club et il y a une foule d’éléments à prendre en compte.

Malgré sa préparation très réduite, Cyril Baille s’est entraîné dans la peau d’un titulaire à Marcoussis en début de semaine. Cela vous surprend t-il ?

Absolument pas. À ce niveau-là, il n’y a pas de place pour l’à-peu-près. Si le staff fait le choix de le titulariser, c’est que le staff a des certitudes quant à son état de forme. Le cas de Cyril est un peu similaire à celui de Romain Ntamack. Ils sont des hommes clés du système, des cadres là depuis le début de l’aventure de ce groupe France. Une des interrogations que l’on peut avoir, c’est la durée de son autonomie après avoir passé autant de temps sans jouer. Mais là encore, c’est une problématique que le staff a sans doute anticipée. Par contre, en aucun cas il ne faut voir une titularisation de Baille comme une sanction envers Priso. C’est un choix tactique et stratégique du staff, un calcul sur le rendement de l’équipe sur toute la durée du match. Lequel des deux débutera ? Lequel des deux aura le rôle si important de « finisseur » ? Le moindre détail compte.

Pensez-vous que Dany Priso possède les armes pour répondre au défi physique que pourraient imposer les Boks ?

Si on se pose la question pour Dany, pourquoi ne pas aussi se la poser pour Cameron Woki, qui aura sans doute Eben Etzebeth en face de lui ? Je ne suis pas inquiet sur la qualité de Dany. Je pense au contraire qu’il peut vraiment tirer son épingle du jeu, notamment grâce à sa mobilité. D’autant plus dans ce rugby de très haut niveau, arbitré par des hommes en noir de très haut niveau, qui rendent le jeu « clean » et moins « permissif ».

Les Boks ont quand même gagné leur titre de champion du monde sur la sauvagerie de leur 8 de devant…

Disons qu’ils ne se sont pas reniés. Ils ont bâti leur titre suprême sur la double poussée de leur mêlée, avec laquelle ils ont étrillé le pack anglais. Mais à l’époque, le 8 de devant sud-africain n’avait pas d’équivalent en termes de puissance… Aujourd’hui… celui des Bleus n’a rien à lui envier.

Vraiment ?

Oui. Le pack des Boks est très puissant mais cela s’arrête là. Celui des Bleus, en plus d’être extrêmement puissant, est aussi furieusement habile techniquement. Celui des Australiens est technique mais peu puissant. Je le disais, selon moi, la France dispose d’un réel avantage grâce à la complémentarité de ses joueurs.

Est-ce à dire que les Bleus ont le meilleur paquet d’avants du monde ?

Attention, le vainqueur de cette tournée ne sera pas champion du monde. Mais disons qu’avec notre pack au complet et à son meilleur niveau, nos adversaires ne devraient pas très bien dormir la veille des matchs.

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