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200 ans de légendes (34/52) : 1979, Patrick Salas, venu du Diable Vauvert

  • Patrick Salas, ancien international français, est décédé en 2017.
    Patrick Salas, ancien international français, est décédé en 2017.
Publié le Mis à jour
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Il ne devait pas jouer, il a été appelé au dernier moment à un poste qui n’était pas le sien. Et il devint le héros d’un exploit historique à Auckland face aux All Blacks

Nous sommes tous des Patrick Salas. L’exploit d’Auckland du 14 juillet 1979 des Bleus de Jean-Pierre Rives a été examiné sous toutes les coutures mais sa facette la plus extraordinaire restera pour toujours la présence au pote de numéro 8 de ce joueur de Narbonne . Patrick Salas décédé en 2017 s’est retrouvé parachuté sans préparation sur le champ de bataille, pompier héroïque au secours d’un XV de France au plus mal. Qui n’a pas rêvé de vivre ça ? Ou qui n’a pas vécu ça sous forme de cauchemar dans la peau de celui qui se retrouve sous les feux des projecteurs sans être sûr de le mériter avec tous les risques que ça comporte.

Tout a commencé au matin du match quand Christian Bèguerie, le troisième ligne d’Agen serra la main à son entraîneur Toto Desclaux et se blessa sous cette pression virile Disons que le salut de l’"homme de terrain" réveilla ou révéla la blessure dont souffrait le joueur titulaire, main infectée. Il ne restait plus qu’une solution, propulser le deuxième ligne Patrick Salas à un poste qu’il n’avait jamais occupé en club . Il était un deuxième ligne de devoir, un colosse plutôt paisible, précurseur de la musculation. De son propre aveu, il n’avait pas vraiment le profil en termes d’endurance, d’adresse ballon en main ou de vitesse : "Mais j’aimais plaquer, ça oui !"

Il n’y avait plus personne pour assumer ce rôle, puisque Yves Malquier le "vrai" numéro 8 de Narbonne s’était également blessé en début de tournée. Jean-Luc Joinel aurait pu faire l’affaire, mais il n’y aurait eu plus personne pour jouer avant-aile avec Jean-Pierre Rives.… En fait, Patrick Salas avait déjà été essayé à ce poste le mercredi précédent face au Southland à Invercargill, pas une franche réussite : la France avait perdu 12-11. Toto Desclaux avait annoncé la composition du test dans le bus, sans lui, Patrick Salas avait versé des larmes "grosses comme le poing".

Le 14 juillet, Patrick Salas apprit donc la nouvelle à 7h30, en se pointant au petit-déjeuner, on imagine l’ascenseur émotionnel. Et en plus, il sortait d’une nuit blanche, "Sur le moment, je me suis dit, c’est une catastrophe ; Ce match j’en rêvais, mais dans l’état où j'étais. Je n’ai rien dit pour ne pas flinguer ma carrière, mais dans ma tête, ça gambergeait." (Midi-Olympique 2002, Bruno Fabioux). De quel état parlait-il ? Il s’était totalement lâché la nuit précédente, avec ceux qui ne jouaient pas dont un certain… Serge Blanco, il était sorti jusqu’à 5 heures du matin, à pas de loup pour ne pas réveiller son compagnon de chambrée Alain Maleig.

Gallion le rassure

En interne, il fallut monter un plan commando pour forger un moral conquérant à l’appelé de dernière minute, "Jean-Pierre Rives m’a rassuré, ça m’a encouragé." Patrick Salas y mit aussi du sien en avalant du Guronsan, le grand remontant de l’époque. En 2019, Jérôme Gallion nous avait dit : "Il était affolé... Je l’ai rassuré . Je lui ai expliqué deux combinaisons simples, style 89 pour ne pas m'embrouiller. Je lui ai expliqué comment se placer en touche et en défense sur les mêlées. Je lui ai dit : au lieu de m’écarter, je prendrai le premier porteur de balle, tu prendras le second. C’était au contraire aux usages, mais pour un joueur non habitué à se relever vite, ça me paraissait difficile ."Puis, ce fut le nirvana, La célèbre victoire 24-19, première sur le sol néo-zélandais, avec un Salas en état de sublimation. Une machine à plaquer : "Pour lui c'était un défouloir, il se sentait un peu juste en numéro 8 , il a tout donné".

Longtemps après, en 2016, un an avant sa mort, il avait ouvertement expliqué pourquoi il ne se sentait pas d’attaque de matin là (Philippe Pailhoriès, l’Equipe) confirmant ce qui ne se disait que sous le manteau ou que lui demandait de taire jusqu’alors : "Ce n’était pas une soirée arrosée comme le dit la légende. C’était une soirée câline Dans les hôtels d'Auckland, il y a des pubs avec, disons, des demoiselles. J'ai bu une demi-bière, puis j'ai causé avec cette fille. Il y avait l'interprète de l'équipe de France et je possédais aussi un petit dictionnaire d'anglais, mais on n'a pas eu le temps de faire de grands discours. Je n'ai pas beaucoup dormi, j'ai fait parler la kalachnikov toute la nuit."

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