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XV de France - Anthony Jelonch, les preuves de caractère

  • Anthony Jelonch sous le maillot du XV de France.
    Anthony Jelonch sous le maillot du XV de France. Abaca / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Victime d'une rupture du ligament croisé du genou droit contre Bath dimanche, Anthony Jelonch est de nouveau confronté à une terrible épreuve, lui qui avait subi la même blessure au genou en février 2023 et s'était lancé dans un incroyable contre-la-montre pour participer à la dernière Coupe du monde. Autour de lui, tous assurent que, malgré la douleur et porté par un état d'esprit hors du commun, le Gersois reviendra encore plus fort. 

Les premiers frissons, dans l’entourage du Stade toulousain, sont arrivés peu avant 22 heures dimanche soir. À cet instant, Anthony Jelonch savait déjà. Comme lors de ce funeste France-Ecosse pour lui, le dimanche 26 février 2023, lorsqu’il avait annoncé à ses coéquipiers dans le vestiaire du Stade de France que son genou gauche l’avait lâché. Près de onze mois plus tard, rebelote, de l’autre côté cette fois. Après la victoire contre Bath, concluant une phase de poule de Champions Cup parfaitement maîtrisé par les Rouge et Noir, le Gersois a livré le même diagnostic à ses partenaires : "Ce sont les croisés." Au cours de la soirée, le doute n’était même plus permis au sein du staff, qui n’attendait que la confirmation médicale après l’IRM (Image par résonance Magnétique) passée en urgence. La sentence est officiellement tombée et Jelonch a décroché son téléphone pour prévenir Fabien Galthié.

Ce dernier racontait lundi, lors de la conférence de presse de lancement du Tournoi des 6 Nations : "Anthony m’a appelé hier soir (dimanche) après son IRM. Il m’a dit avoir le ligament croisé antérieur du genou droit rompu. Il s’agit de l’autre genou, pas celui qui a déjà été opéré. On connaît le protocole et la durée d’indisponibilité sur ce type de blessure. On lui souhaite beaucoup de courage. On est vraiment triste pour lui, il va nous manquer. » D’autant plus triste que le sort s’acharne sur un garçon exemplaire, humainement et sportivement, dont le côté rassembleur fait l’unanimité au sein du groupe toulousain ou de celui des Bleus. Une vertu qui l’a propulsé au rang de leader en équipe nationale, malgré sa discrétion et son humilité, lui qui fut capitaine du XV de France lors de la tournée estivale en Australie (en 2021) ou… face à l’Uruguay lors de la dernière Coupe du monde.

Anthony Jelonch avait été nommé capitaine du XV de France face à l'Uruguay.
Anthony Jelonch avait été nommé capitaine du XV de France face à l'Uruguay. Icon Sport - Icon Sport

"Il ne faut jamais cesser d'y croire"

Ce jour-là, samedi 23 septembre, restera gravé à vie pour l’ancien Castrais. Pas pour la performance collective décevante des Bleus (27-12), ni même pour un capitanat qui revêtait un symbole magnifique. À Lille, cinq mois et demi après son opération, Jelonch avait officiellement relevé l’immense défi qu’il s’était fixé, celui de revenir à temps pour la Coupe du monde. "Je me donnerai à fond pour continuer à y croire, nous avait-il confié fin juin. Je me dis qu’il ne faut jamais cesser d’y croire." Il le disait avec la pudeur qui le caractérise, en homme de la terre et fils de paysan qu’il est à jamais. Son père Jérôme l’illustrait ainsi à travers un message envoyé à sa progéniture, dans ces mêmes colonnes, début septembre :  "Anthony, tu sais qu’à l’automne, on sème le grain le grain sans savoir si on va pouvoir le récolter en juillet." En fin d’été, la récolte avait viré à la moisson. Même si, pour aller au bout de son rêve, il a dû enchaîner les sacrifices et les heures de travail. Au club à Toulouse, à Montpellier auprès du manager santé du XV de France Bruno Boussagol avec qui il a effectué une partie de sa rééducation en pleine nature, ou au Cers de Capbreton où il a fait deux aller-retour.

"Avoir la Coupe du monde en tête aide à se lever tous les matins, poursuivait-il en juin. Mais, s’il n’y avait pas eu cet événement, je me serais fixé d’autres objectifs pour aider mon club. Chaque matin, j’ai envie d’aller bosser, me soigner, me rééduquer." Un quotidien qu’il va malheureusement retrouver dans les mois à venir, alors qu’il ne devrait pas subir d'intervention chirurgicale avant la semaine prochaine. La différence ? Elle est énorme, sachant qu’il n’y aura pas la compétition d’une vie au bout d’un chemin volontairement raccourci. Cette fois, tout le monde s’accorde – parmi ses proches et du côté du Stade toulousain – à répéter qu’il "prendra le temps qu’il faudra". Bref, qu’il ne sera pas lancé dans un contre-la-montre et qu’il ne reviendra sur les terrains qu’en début de saison prochaine au mieux, après avoir vécu une préparation estivale digne de ce nom.

Anthony Jelonch avait déjà subie une blessure aux ligaments croisés, en février 2023 face à l'Écosse.
Anthony Jelonch avait déjà subie une blessure aux ligaments croisés, en février 2023 face à l'Écosse. Icon Sport - Icon Sport

"Je suis issu d'un monde où le mental prend beaucoup de place"

Pour autant, si le traumatisme est forcément grand pour un garçon qui doit faire le deuil d’une deuxième fin d’exercice d’affilée, alors qu’il a observé depuis les tribunes du Stade de France Romain Ntamack traverser la pelouse et offrir aux siens le Bouclier de Brennus en juin dernier, Jelonch étonne déjà autour de lui. Par son caractère, sa détermination et aussi sa propension à toujours relativiser, même quand le ciel lui tombe encore sur la tête. Dans l’intimité, il n’a déjà pas caché sa farouche volonté de revenir plus fort. Il en est ainsi : Jelonch encaisse, puis Jelonch bosse et Jelonch revient plus fort. "Je suis comme ça et je suis convaincu qu’on n’arrive pas au haut niveau sans un gros mental, dit-il. Je suis quelqu’un de la campagne, issu d’un monde où le mental prend beaucoup de place." Son pote et colocataire Paul Pimienta, qu’il connaît depuis les cadets à Auch et qui joue trois-quarts centre à Colomiers, nous le décrivait récemment : "Sur le coup, c’est toujours plus compliqué pour ses proches que pour lui. Il nous met sur le cul, nous dit : "C’est comme ça, ça devait m’arriver." Il n’est pas du tout du genre à se mettre la tête au fond du seau. Il voit les choses… (Il hésite) Différemment disons." Parce que le détachement demeure son arme fatale. Celle qui lui a permis, lors du Mondial, d’effacer toute appréhension après quelques charges et de se faire une place de titulaire lors du quart de finale perdu contre les Springboks. "C’est un mec qui s’intéresse à tout mais, dès que ça le concerne, il a beaucoup de recul, insiste Pimienta. Il vit les choses comme un enfant, avec un côté insouciant. Pour lui, si ça doit se passer, ça se passe…"

Jelonch aura besoin de conserver cet état d’esprit pour surmonter les épreuves à venir et évacuer ce légitime sentiment d’injustice. Encore une fois. « C’est un garçon à part, l’avait un jour classé son manager Ugo Mola. Au-delà de la qualité du joueur, il ne faut pas sous-estimer celle sur le plan humain. » Et Pierre-Henry Broncan, Gersois comme lui et qui l’a eu sous ses ordres à Castres, de renchérir : « Anthony est robuste naturellement, élevé à la ferme. Il n’est pas devenu costaud en salle de musculation. Il faut lui faire confiance. » D’autant qu’il ne trichera pas. Jamais. Ni sur un terrain, si en salle de rééducation, ni nulle part ailleurs. En plein Mondial, Paul Pimienta nous avait prévenus : "Anthony laissera son corps s’il le faut pour être champion du monde". Ce même corps de nouveau meurtri aujourd’hui, même s’il n’a pas connu le bonheur de soulever le trophée Webb-Ellis en octobre. Mais Jelonch n’a que 27 ans et une ambition intacte. Demain, il aura deux genoux neufs et toujours un tempérament hors du commun.

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Les commentaires (3)
cantewitko Il y a 3 mois Le 25/01/2024 à 12:00

Bien dit aussi !!!
Et surtout Anthony sache qu'on doit être très nombreux en France à souhaiter ton retour mais pas seulement pour notre jeu de rugby préféré
Dans un monde si bizarre, savoir qu'il y a des garçons comme toi avec une grande qualité humaine et sans égo hypertrophié, ça fait du bien au moral !
Au plaisir de te revoir souriant et en pleine forme... au delà des terrains !
Go fight !

daveho Il y a 3 mois Le 24/01/2024 à 23:44

Je me dis juste qu'on a la chance d'avoir ces mecs là comme représentants du rugby français....Messieurs Jelonch, Aldritt, Dupont, Ntamack, Ollivon, Fickou, Danty, Baille, M&M au talon, Atonio, Flament et tous les autres, ne changez rien!!! Quelle génération de sportifs et d'hommes !!!! Du bulbe, de l'humilité et du talent. La fierté de leurs parents est plus que légitime. ne changez rien et au plaisir, Anthony, de vous revoir bientôt transpercer les défenses adverses et asséner vos plaquages dévastateurs.

Morisketou Il y a 3 mois Le 25/01/2024 à 08:38

Bien dit !