1994, l'exploit du siècle

Par Rugbyrama
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Chaque jour, notre site revient sur un exploit marquant du XV de France dans l'hémisphère sud à travers des anecdotes tirées, notamment, des éditions de Midi Olympique de l'époque. Le septième volet de notre série est consacré à la seconde victoire des Bleus en Nouvelle-Zélande en 1994.

Les Bleus déjà auteurs d'un exploit à Christchurch le 26 juillet en ayant fait tomber les Blacks chez eux, vont devoir livrer un nouveau combat qui s'annonce titanesque face à des Néo-Zélandais blessés dans leur amour propre. L'enjeu est sportivement exaltant, mais bien plus que ça, pour les tricolores il s'agit ni plus ni moins de faire l' Histoire et de graver leurs noms en majuscule sur les tablettes du XV de France, pour l'éternité.

La terre promise

Fitzpatrick, tel l'archange de la vengeance, avait promis l'enfer aux français après le match de Christchurch, la défaite, amère, au bout des lèvres. Mais déjouant les imprécations du talonneur des Blacks, la bande à Saint-André, désormais confirmé dans ses fonctions de capitaine, va traverser les limbes en ramenant une victoire au goût de paradis. Dans le mythique stade d' Eden Park, gonflé à bloc, les Bleus vont renverser le score et le public néo-zélandais en livrant un match d'une rare beauté, qui ne dévoilera son issue que dans l'ultime minute de jeu au terme d'un suspense théâtral. Verdict: 23-20. Le rugby français atteint ce dimanche 3 juillet son sommet. C'est toute une génération de joueurs surdoués, dont on attendait beaucoup, qui confirme ses qualités et son potentiel en accrochant le résultat le plus prestigieux de son histoire. Quelle année folle pour le XV de France! En effet, ce doublé historique sur les terres de l'équipe à la fougère vient couronner une saison où les français ont successivement battus les Springboks chez eux, les champions du monde australien et maintenant les Néo-Zélandais. Un palmarès de meilleur équipe du monde! Mais ne le méritaient-ils pas en récompense de leur immense talent, les Benazzi, Sella (1er français trois fois vainqueur des Blacks), Sadourny, Deylaud, Saint-André, Cabannes, Roumat et autre Ntamack (celui qu'on surnomme en Nouvelle-Zélande le fantôme de Blanco)?

Face aux Blacks de Fitzpatrick, Lomu et Kirwan, les français mènent une prestation collective superbe, orchestrée par une charnière irréprochable, dans laquelle chacun joua sa partition avec brio. Sadourny dans le rôle du bourreau, portera le coup de grâce.

L'essai du bout du monde

"Dans mille ans, on parlera de cet essai" écrivait Midi Olympique au lendemain du match. Quinze ans plus tard en tout cas, personne ne l'a oublié et il reste aujourd'hui comme une référence quand on cherche à établir un listing des plus beaux essais de tout les temps. L'essai de jean-Luc Sadourny, c'est du grand art, un chef d'&oeliguvre collectif, mais c'est surtout l'essai du triomphe, qui va sceller le sort de la rencontre. A cinq minutes de la fin du match, les Blacks mènent au tableau d'affichage, 20 à 16. Ils cherchent alors à confisquer le ballon en attendant que la pendule égrène ses dernières secondes. Berbizier est descendu de la tribune pour haranguer ses joueurs. Sur le terrain, Cabannes, alias "Bionic man", hurle, le regard fièvreux: "On leur met le feu!" Saint-André donne les consignes de la dernière chance: " On garde le ballon dans le terrain et on les joue tous " . Steven Bachop, l'ouvreur néo-zélandais, écope du ballon et veut trouver une dernière touche dans le camp français pour tuer le match. Mais Bachop, qui connaît là sa première sélection à 28 ans, va avoir le pied qui tremble, la gonfle ne passera pas la ligne de touche et va atterrir dans les bras du capitaine français. S'ensuit une action mémorable qui va traverser le terrain d'un bout à l'autre, impliquant neuf joueurs français, tous réalisant dans une même symphonie de passes, le geste juste. Saint-André s'élance, le pack surgit à son relais, Blond sacrifie son genou mais passe pour Gonzalez, qui offre le ballon au cordeau pour Christophe Deylaud. "Le farfadet de Portet" s'en va cadrer le premier rideau et se rappelle la stratégie: jouer à fond les ballons de renversement côté Lomu pour profiter de sa faiblesse défensive. La grenade Bénazzi est lancée, à son relais Ntamack le feu-follet, trouve Cabannes qui sert Delaigue, il met la défense dans le vent, stoppe sa course, la reprend, passe son offrande à Accoceberry, accouru depuis le bout du monde. Plus que quelques mètres, mais à bout de force, il offre l'essai à Jean-Luc Sadourny, qui conclut ce mouvement magnifique d'une équipe au diapason.

Les Bleus triomphent. Inoubliable moment d'une légende que jusqu'au bout, les français n'ont pas voulu laisser s'échapper.

Fiche technique:

A Auckland (Eden Park, dimanche 3 juillet 1994) 40000 spectateurs.

France bat Nouvelle-Zélande 23 à 20 (mi-temps: 13-9)

Pour la France: deux essais de Ntamack (29e) et Sadourny (79e); deux transformations de Lacroix et Deylaud; trois pénalités de Lacroix (1ère, 39e) et Deylaud (64e).

Pour la Nouvelle-Zélande: un essai de Fitzpatrick (56e); cinq pénalités de Cooper (3e, 12e, 35e, 60e, 66e).

Nouvelle-Zélande: Timu; Kirwan, Bunce, Cooper, Lomu; (o) S. Bachop, (m) Foster; Brewer, Brooke (puis Pene 76e), Larsen; Cooksley, Jones; Brown, Fitzpatrick (cap), Loe.

France: Sadourny Jean-Luc; Ntamack Emile, Sella Philippe, Lacroix Thierry, Saint-André Philippe (cap); (o) Deylaud Christophe, (m) Accoceberry Guy; Cabannes Laurent, Benetton Philippe, Benazzi Abdel; Roumat Olivier, Merle Olivier; Califano Christian, Gonzalez Jean-Michel, Benezech Laurent.

Remplaçants: Delaigue Yann (60e, Lacroix), Blond Xavier (73e, Benetton), Brouzet Olivier (79e, Blond), Armary Louis (60e, Califano).

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