Goromaru : une icône au bord de la route

  • Top 14 - Ayumu Goromaru (Toulon) contre Montpellier le 23 décembre 2016
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  • Top 14 - Ayumu Goromaru (Toulon) contre le Stade Français le 23 décembre 2016
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  • Mourad Boudjellal president - Toulon
    Mourad Boudjellal president - Toulon
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INTERNATIONAL - Il a peu de chances de participer à la Coupe du monde organisée dans son pays l’an prochain. mais l’ancien Toulonnais, Ayumu Goromaru, reste une célébrité, presque un mythe au Japon. Rencontre.

Rencontrer deux fois Goromaru dans une journée n’est pas une chose banale. Le matin, il accueillait les visiteurs du stade Shizuoka Stadium Ecopa, dans la position du buteur qui l’a rendu célèbre… sous la forme d’une statue dorée. Cette vision inattendue disait tout de sa popularité dans l’archipel nippon. L’après-midi, à cinq ou six kilomètres de là, son attitude était à peine moins figée. En jogging à cause d’une légère blessure, il assistait à l’entraînement de ses coéquipiers des Yamaha Jubilo non pas sur leur terrain habituel dans la préfecture de Shizuoka, mais sur une pelouse de football spartiate juste au bord de la route, cernée par des champs de thé. Aucun contrôle, aucun agent de sécurité pour veiller sur la trentaine de joueurs qui répètent des exercices en maillot bleu et sur cette vedette "sacrée" médiatiquement (et financièrement) par la Coupe du monde 2015 organisée par l’Angleterre, en quatre matchs ou plutôt trois plus un, tant le succès face aux Springboks (34-32) reste un événement, "hors sol".

Ce qui disait tout de la popularité de Goromaru ce fameux mardi d’octobre, c’était l‘émotion d’une jeune interprète, clairement sous le charme : "Je ne viens pas d’une famille de rugbymen, je ne connais pas beaucoup de joueurs, mais il est si séduisant…" On s’attendait à le rencontrer au siège d’une multinationale (Yamaha) dans un salon luxueux mais stéréotypé. On le trouve en pleine campagne, appuyé sur une barrière en bois, dans une posture de cow-boy, façon John Wayne ou Gregory Peck. Son allure est incontestable.

Oui, je ne vais pas vous le cacher, cette victoire en Coupe du monde m’a donné tant d’opportunités

Plus costaud qu’on ne l’aurait cru, Ayumu Goromaru est pourtant devenu plus grand que le rugby japonais. Il a même donné des coups d’envoi fictifs de matchs de baseball, sacrée référence pour ceux qui connaissent le Japon de l’extérieur. Depuis une certaine rencontre face aux Springboks à Brighton, il y trois ans, sa vie a changé. "Oui, je ne vais pas vous le cacher, cette victoire en Coupe du monde m’a donné tant d’opportunités. J’ai vécu des choses que je n’aurais jamais vécues, j’en suis bien conscient... Il y a eu notamment ses offres venues de l’étranger ; personne ne se serait intéressé à moi, sans cet exploit du Mondial. Mais je sais aussi ce que je dois aux autres et notamment à Eddie Jones. Il m’a beaucoup apporté, je ne l’oublierai jamais."

Le dernier événement, c’est ce film qui est en préparation sur le miracle de Brighton, avec sans doute pas mal de plans sur un acteur qui le représentera. "Bien sûr, que ça fait quelque chose de voir un film où quelqu’un va peut-être jouer votre rôle et celui de vos coéquipiers. Je fais partie de ceux qui avaient été très impressionnés par Invictus, le film de Clint Eastwood. L’important, c’est que ce futur film devienne une sorte d’emblème pour le rugby japonais. Un repère historique. Il sera sans doute une référence incontournable, et le signe que le rugby est entré dans une nouvelle ère. Rien ne sera plus jamais comme avant." éloigné de l’équipe nationale Évidemment, tout n’a pas été si rose pour lui depuis ce jour de gloire.

Top 14 - Ayumu Goromaru (Toulon) contre le Stade Français le 23 décembre 2016
Top 14 - Ayumu Goromaru (Toulon) contre le Stade Français le 23 décembre 2016

Quelques blessures, deux séjours à l’étranger où il ne s’est pas imposé à cause de la concurrence, l’ascension de Kotaro Matsuchima. Il n’a plus été appelé en équipe nationale depuis 2015, il n’a même pas fait partie de l’aventure des Sunwoves en Super Rugby. Et pas question pour lui d’en parler. Peut-être se dit-il qu’à la faveur d’un coup du sort, il peut toujours revenir in extremis chez les Cherry Blossom, d’ici à l’an prochain et ce Mondial qu’organisera son pays.

Après tout, il est devenu le meilleur réalisateur de l’histoire de la Japan Top League avec 1 195 points. Les deux Toulonnais qui l’ont impressionné De son passage à Toulon, Goromaru tire un bilan positif, bien au-delà des réserves émises par Mourad Boudjellal et un départ sans doute précipité. "Oui, nous avons été très heureux de passer cette année en France avec ma famille, ce fut une expérience très positive pour moi. J’ai découvert ce championnat énorme, et cette nouvelle façon de jouer au rugby. J’ai découvert un monde que je ne connaissais pas bien sûr, avec tous ces joueurs de qualités venus de tous les coins du monde et ces stades. C’était impressionnant. Après, je ne vais pas le cacher, j’aurais aimé jouer un peu plus, c’est vrai. Si je devais retenir deux hommes qui m’ont marqué. Je citerais, pour les Français, Guilhem Guirado. J’ai été marqué par son style de combattant, tout le travail qu’il abat pendant 80 minutes, mais aussi et surtout par sa gentillesse. Il fut très bon pour moi, vraiment. Je citerais ensuite Matt Giteau pour son adresse ; il possède un talent vraiment extraordinaire. Ça valait le coup de venir pour jouer avec des gars comme eux."

Mourad Boudjellal president - Toulon
Mourad Boudjellal president - Toulon

D’ailleurs cet exil vers l’Ouest, l’aura davantage marqué que le suivant, en direction du Sud, chez les Reds de Brisbane : "Ce ne fut pas du tout pareil. J’ai découvert moins de choses là-bas, en Australie. Je connaissais déjà le style de rugby pratiqué en Super Rugby."

À voir l’effervescence qu’il suscite, même chez les jeunes filles les plus réservées, on se demande quand même si cette notoriété n’est pas pesante au quotidien. Le prix à payer pour ses contrats avec des marques de bière, de lessive ou de riz frit peut être parfois lourd. Le regard droit, le verbe calme, l’esquisse d’un sourire au coin des lèvres, Goromaru répond, superbe et impérial : "Vous savez, je ne vis pas dans la région de Tokyo. Je vis dans une zone rurale très calme. Je suis détaché de tout ça."

Digest...

Né le : 1er mars 1986 à Fukuoka (Japon)

Mensurations : 1,85 m pour 98 kg

Poste : arrière

Clubs successifs : Waseda University, Yamaha Jubilo (2008-2016), Toulon (2016-2017), Reds (2016) ; Yamaha Jubilo (depuis 2017)

Sélections nationales : 56

1er match en sélection : 16 avril 2005, face à l’Uruguay (défaite 24-18 à Montevideo)

Points en sélection : 708, dont 18 essais

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