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Le plus fou de tous les derbys

  • Les supporters biarrots ont envahi la pelouse pour fêter la victoire.
    Les supporters biarrots ont envahi la pelouse pour fêter la victoire.
Publié le Mis à jour
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Une double prolongation, une séance de tirs au but jusqu’à la mort subite et Steffon Armitage qui envoie Biarritz en Top 14 et Bayonne en Pro D2. Ce barrage entre Basques est entré dans la postérité.

Dans un derby basque, dit-on sur les bords de la Nive comme sur la Grande Plage, il n’y a rien de logique ni de rationnel. Ce samedi, jour de barrage entre frères ennemis, promettait donc d’être unique en son genre. Deux heures avant le coup d’envoi, la promesse était déjà tenue. Et de quelle manière !

Sur les coups de 15h30, la rue Haguet, que l’on imagine si paisible d’ordinaire, s’est embrasée sous la chaleur des fumigènes et la ferveur de centaines de chanteurs biarrots. L’arrivée des Rouge et Blanc au stade Aguilera avait commencé à planter le décor de l’après-midi, avec une haine d’honneur à filer des frissons au premier passant. Une petite heure plus tard, changement d’atmosphère radical, de l’autre côté du stade : le débarquement des Bayonnais a donné lieu à une cérémonie d’accueil des plus hostiles avec quelques lancers de drapeaux et slogans vindicatifs, le “Monribot au cachot” recueillant le plus de voix. Cet amour jusqu’à la déraison avait contaminé tout un peuple. Au point de voir les tribunes d’Aguilera se remplir comme par magie pour porter l’affluence aux alentours des 8 000 spectateurs quand tout événement organisé dans le pays est censé être limité à 5 000 personnes. Irrationnel vous avait-on dit.

Le tableau enfin complet, il ne restait plus aux acteurs qu’à écrire la pièce. Le mélodrame tant attendu. Là aussi, la promesse d’une confrontation atypique a été tenue. À 17h30, il n’y avait plus d’équipe de Top 14 et de club de Pro D2 mais deux formations déterminées à en découdre. Il en a découlé un bras de fer étouffant au possible, sans autre fil directeur que l’instinct de survie. À ce petit jeu de force pure et de résistance mentale, les deux équipes se sont très longtemps neutralisées : à Bayonne, la domination en mêlée fermée mais aussi la maladresse sur chaque ballon aérien ; à Biarritz, le plus de munitions mais aussi les pertes de balle par dizaines. Dès qu’une équipe paraissait en mesure de prendre l’ascendant, l’autre répliquait. Sans parvenir à convertir son avantage. Résultat : entre l’échec inhabituel de Gaëtan Germain, les passes de U10 de Henry Speight, les trois sorties sur blessure en vingt minutes, les pénalités non tapées, les touches directes ou encore la loterie des mauls, les 9000 spectateurs d’Aguilera ont eu droit à plus de coups de théâtre que de points. Même le score paraissait improbable.

Lafage, ce drop qui n’est jamais venu

Le 3-3 au tableau d’affichage a longtemps tenu la France en haleine. Le dénouement, comme le scénario de cette partie, comme cette affiche rêvée ou cauchemardée, ne pouvait être de l’ordre du rationnel. Le déclic aurait pu venir du plus gros flop du mercato biarrot, Henry Speight si la pénalité obtenue par l’ailier wallaby, à la 75e, pour un plaquage haut, avait été convertie par James Hart. La fin aurait sûrement dû s’écrire cent vingt secondes plus tard quand, à douze dans le pack, l’Aviron parvenait sur la ligne d’en-but. Après une dizaine de charges, l’assaut ciel et blanc se fracassait sur le mur rouge, à la sirène. Sous les yeux impuissants de Maxime Lafage, en position de drop depuis une éternité. À quinze mètres, face aux poteaux. C’eut presque été trop logique, trop évident. Moralité : un derby ne se gagne pas juste avec les muscles mais aussi avec la tête. Les Bayonnais l’avaient oublié.

Tout un Pays a donc retenu sa respiration encore vingt minutes. Le temps d’une double prolongation, cas de figure si rare à ce niveau de la compétition. Après une énième erreur bayonnaise, James Hart doublait enfin la mise des siens (83e). À quelques centimètres près, il aurait pu porter leur avance à six longueurs. Quelques centimètres, c’est aussi ce qui a manqué à Aymeric Luc pour inscrire un incroyable essai sur le renvoi de Manuel Ordas, pour son premier ballon (90e). La deuxième pénalité de l’Aviron, dans la continuité de ce temps fort, laissait entrevoir la perspective de tirs au but. Ce 113e derby, fou de bout en bout, techniquement faible mais émotionnellement mémorable, ne méritait pas un autre dénouement. À la 103e minute, un dernier en-avant basque amenait tout le monde à l’impensable.

Une conclusion - empruntée au ballon rond - presque trop grosse pour être vraie. Et pourtant, successivement, Basques et Bayonnais se sont avancés jusqu’à la ligne des vingt-deux mètres pour tenter d’envoyer le ballon entre les poteaux et l’allée des platanes. Gaëtan Germain, James Hart, Manuel Ordas, Gilles Bosch, Guillaume Rouet, Steeve Barry, Théo Costossèque, Barnabé Couilloud, Peyo Muscarditz et Francis Saili ne tremblaient pas. La mort subite allait trancher : le premier échec pouvait dès lors être fatal. Aymeric Luc dévissait sa tentative, offrant à Steffon Armitage la balle de match : le numéro 8, le premier avant lancé au feu, offrait à Aguilera la plus belle des victoires et la plus grande des émotions.

Qui aurait imaginé, au début de la saison, que Biarritz retrouverait l’élite en envoyant Bayonne en Pro D2 ? Qui aurait pu miser un euro, à 17h29 ce samedi, sur une pénalité gagnante de Steffon Armitage dans les tirs au but ? Le 113e derby de l’histoire du Pays basque a rendu l’improbable possible. Irrationnel, vous avait-on prévenu.

Après un match complètement fou, le @BOPBweb retrouve l'élite ! \ud83d\ude31\ud83d\ude31\ud83d\ude31

Le film du match > https://t.co/qxtcHZG47A#BOAB #top14accessmatch pic.twitter.com/TGkzM2948Z

— RUGBYRAMA (@RugbyramaFR) June 12, 2021

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