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Rugby à 7 - Antoine Dupont, récit d’une intégration on ne peut plus réussie

Publié le Mis à jour
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En quinze jours, l’habituel capitaine du XV de France s’est magnifiquement intégré au jeu à VII au point de s’affirmer comme un des meilleurs joueurs de la tournée nord-américaine. Et de repartir avec une médaille d’or autour du cou.

L’aventure américaine d’Antoine Dupont pourrait être résumée à une phrase, comme un pont entre deux dates : l’habituel capitaine des Bleus était arrivé avec l’étiquette de vedette du rugby à XV à Vancouver ; il va repartir de Los Angeles avec une réputation de septiste de haut niveau, à la fois reconnu et redouté par ses pairs, une médaille d’or autour du cou, qui plus est.
L’intégration du Toulousain s’est pour ainsi dire déroulée comme dans un rêve. Ou plutôt comme dans l’esprit de Jérôme Daret : "Quand je vois toutes les aptitudes et les standards de ce joueur, il me tarde de voir ce que ça va donner", nous confiait-il le mercredi précédant son entrée en scène. Et l’entraîneur de tempérer les ardeurs : "L’idée est de l’intégrer progressivement, avec toujours la nécessité de construire le collectif."

L’impatience du monde du VII de le voir à l’œuvre était en tout cas partagée par les milliers d’amateurs et curieux venus le vendredi au BC Place de Vancouver. Impressionnant théâtre où le tricolore s’est retrouvé au centre de l’attention et de tous les égards, entre ses multiples apparitions sur le (très) grand écran et la clameur générale à son entrée en jeu face aux Etats-Unis. "Je ne me sens pas légitime de recevoir cette ovation", réagira l’intéressé, quelques heures plus tard. Les applaudissements, le natif de Castelnau-Magnoac ne les accepte que pour les performances sur le terrain. Après deux entrées en jeu pour se dégourdir les jambes et prendre la mesure du rythme de la discipline, le numéro 25 s’est libéré progressivement : son essai face à l’Australie, à l’occasion de sa première titularisation, sur une course de trente mètres a donné le ton ; son essai décisif en quart de finale face à l’Irlande, après un départ dans le fermé, a fixé le tempo : le nouveau venu allait vite, très vite. Quelques minutes et autant de plaquages ravageurs face à la Nouvelle-Zélande plus tard, Antoine Dupont concluait son premier tournoi par une prestation trois étoiles pour décrocher le bronze : avec une merveille d’essai en solitaire, une passe après contact sacrément osée pour Aaron Grandidier-Nkanang et une à l’aveugle pour Théo Forner. Le génie du quinziste n’a donc pas de limite.

Par-delà l’insatiable soif du compétiteur, lui a vécu ce baptême avec le plaisir d’un enfant découvrant une nouvelle passion : “C’est un jeu qui est hyper sympa, il y a des espaces partout, plein d’actions à jouer, souriait l’épatant novice. C’est plaisant et c’est un rugby où il faut sentir les coups.” Pour lui qui pue le rugby, la réussite tenait (presque) de l’évidence.

“Des journées très raides”

Avant Los Angeles, ses nouveaux camarades de jeu craignaient encore plus ce nouveau venu pas comme les autres, élu dans l’équipe type du Vancouver Sevens : “J’ai déjà retrouvé toutes les qualités qu’il a pu montrer à XV : il est rapide, costaud, a une belle vision du jeu, commentait Santiago Alvarez, le capitaine de l’Argentine, numéro 1 mondiale. Son adaptation se fait facilement. La France est une bonne équipe, avec un beau potentiel mais il lui manquait peut-être une connexion entre avants et trois-quarts. Antoine peut lui apporter ça." Le meneur argentin résumait le sentiment général : Antoine Dupont est bon et rend les autres meilleurs. Les craintes des adversaires étaient fondées. Tout comme l’intention, pour l’encadrement tricolore, de rehausser son temps de jeu. Comment pouvait-il en être autrement au regard de son apport à chacune de ses apparitions ? À Los Angeles, l’emprise du Toulousain n’a fait qu’augmenter. Auteur d’un nouvel essai en partant du demi-terrain face au Canada au bout de 14 minutes de jeu, rien de moins, il s’est illustré par une merveille de passe au pied pour Nelson Epée contre la Grande-Bretagne avant d’être décisif à plus d’un titre, encore, en quart de finale : face aux Etats-Unis, il s’est d’abord échappé tout seul sur 40 mètres pour lancer la France avant de s’illustrer dans un registre de quinziste en collant au ballon et en animant autour lorsque les Bleus se retrouvèrent en infériorité numérique. Rebelote face à l’Irlande en demi-finale avec un exploit personnel pour débuter et tant d’autres actions positives par la suite. Dans tous les contextes, l’habituel quinziste, poussé dans ses retranchements mais épatant d’endurance, est arrivé à amener sa plus-value au collectif. Remplaçant au début de la finale, il a apporté par sa couverture défensive et des qualités de gratteur développées. Jusqu’à, comme un symbole, offrir l’essai de la délivrance à Théo Forner.

Son sourire en repartant du Dignity Health Sports Park en disait long sur sa joie et son plaisir. Mais aussi sur sa délivrance après deux semaines d’efforts à très haute intensité : “Quand je me suis engagé dans ce projet olympique, c’était pour aller chercher une médaille, évidemment de cette couleur. (…) Au niveau rugby, je ne savais pas ce qui m’attendait en enchaînant deux tournois, surtout avec les trois matchs du samedi avec le lever à 6 heures et le retour à 21h30. Ce sont des journées très raides. J’ai pu me tester dans toutes les conditions, jouer de très gros matchs, avoir du temps de jeu. Et maintenant, je vais avoir une bonne semaine pour me reposer.” Et savourer ce nouvel accomplissement dans sa carrière.

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Les commentaires (6)
AlAmical Il y a 1 mois Le 05/03/2024 à 11:29

Au delà de ses qualités techniques ET athlétiques, AD a une aura de leader et ça, ça ne se commande pas, ça ne s'apprend pas. A chaque apparition il tire l'équipe vers le haut, les joueurs se transcendent à son contact. Il y a de très grand joueurs dans l'histoire qui avait cet impact sur leur équipe et qui créait une dépendance. Certes les médias en font des caisses plus ou moins justifiées mais même les Joey euros le disent, ils ne sont pas les mêmes à son contact. Ces joueurs sont très rares, comme dans tous les sports collectifs ils ont une influence positive par leur présence et forcément négative en leur absence.

envoituresimone Il y a 1 mois Le 04/03/2024 à 16:33

Certes, il a été déterminant mais ses 13 collègues aussi, sans oublier le staf de l'équipe.

Puntadelteno1970 Il y a 1 mois Le 04/03/2024 à 09:06

Antoine Dupont a fait un super tournoi à Los Angeles, c'est indéniable. C'est toute l'EDF qui est allé chercher un titre attendu depuis 19 ans. Cette EDF aurait-elle gagné sans Antoine ? C'est possible mais l'arrivée d'Antoine Dupont dans cette équipe est un réel atout. Je pense que la très longue possession (plus de 5 mn !) de la balle en seconde mi-temps en 1/4 de finale contre les USA à 6 contre 7 est révélatrice de la plus value apporter par Antoine Dupont. Félicitations à toute l'EDF à 7 !

Pragmatique Il y a 1 mois Le 04/03/2024 à 15:21

Même si Dupont est un très grand joueur le rugby à sept se joue à sept plus les remplaçants étant dans la rotation..les médias et le grand public font la même erreur qu avec Dupont à XV.en le surmediatisant à son corps défendant car lui même reste modeste..j aimerais savoir jusqu'à quel point cette quasi idolâtrie ne pèse pas sur les performances et l état psychologique de ses remplaçants..Lucu par exemple..Les coachs des différentes équipes de France doivent particulièrement être vigilants pour ne pas que la zizanie s installe à terme .
Et je répète que Dupont n y est pour rien..plutôt les médias.

pilipili Il y a 1 mois Le 04/03/2024 à 16:46

@Pragmatique : de l'importance pour les joueurs de ne pas trop suivre les médias (ce devrait être le rôle du staff EDF d'encaisser pour eux la pression médiatique (rôle que faisait parfaitement par exemple Novès à Toulouse, qui, par ses petites phrases, attirait toutes les réactions des médias (& les critiques des supporters non ST...). Ceci étant dit, je pense que Lucu sait que AD est hors sol et qu'il ne l'égalera jamais. Mais, pour moi, il est - responsable du mauvais niveau de l'Edf que le système de jeu utilisé (sinon, pourquoi Lucu serait performant avec l'UBB, alors que c'est plutôt le cas ?)

Pragmatique Il y a 1 mois Le 04/03/2024 à 17:15

Je suis d accord avec toi..je ne considère pas Lucu comme responsable du piètre niveau de l equipe de France..je m interroge simplement sur les éventuels effets psychologiques dus à la quasi béatification de Dupont sur ses remplaçants..idem pour Jalibert par rapport à N Tamack.
Et comment les staffs gèrent t ils cela en XV ou à VII..