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Champions Cup - La Rochelle - Leinster : un choc pour un trône d’enfer

Par Vincent BISSONNET
  • Qui sortira vainqueur du duel samedi soir à l’Aviva Stadium ? Les Rochelais de Grégory Alldritt, comme l’an dernier, ou les Leinstermen ?
    Qui sortira vainqueur du duel samedi soir à l’Aviva Stadium ? Les Rochelais de Grégory Alldritt, comme l’an dernier, ou les Leinstermen ? Midi Olympique - Patrick Derewiany
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Un an après l’haletante finale de Marseille, Leinstermen et Rochelais se retrouvent pour une nouvelle lutte au sommet. À domicile, les Dublinois auront l’avantage du contexte. Mais les Maritimes ont un désir de conquête et des armes qui les rendent menaçants.

Depuis plusieurs semaines, quelques mois même peut-être, Ronan O’Gara doit visualiser la scène. Sûrement en rêve-t-il la nuit. Samedi, sur les coups de 17 heures, ses troupes vont s’avancer dans le dernier cercle de l’enfer : l’Aviva Stadium, devenu cimetière des rêves et illusions des rugbymen de tous horizons, all blacks, toulousains, anglais… L’icône de Limerick sait mieux que quiconque tout ce qui attend ses hommes au 4 Landsdowne Road : une escouade surentraînée, survitaminée et surmotivée, escortée par une Blue Army de quelque 50 000 chœurs prêts à rugir 80 minutes durant. « On sait que l’adversaire, le stade, l’ambiance ne seront pas favorables mais, voilà, « let’s go » », lance, sans sourciller, le manager du Stade rochelais. En homme de défis, il ne pouvait espérer meilleur challenge à relever : « Tous les clubs d’Europe voudraient être là, on a de la chance », lâche-t-il comme si de rien n’était, comme s’il n’y avait pas de crainte à avoir à mener cette bataille finale sur les terres de Van der Flier and co.

Tous les clubs en Europe voudraient-ils vraiment être là, être le dernier obstacle sur le chemin d’un trophée que l’équipe bis d’Irlande n’a pas soulevé depuis cinq ans, soit une éternité vue de Dublin ? Permettez-nous d’en douter, cher Ronan… Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, aucune autre formation du Vieux Continent ne paraît mieux armée que le Stade rochelais pour changer la fin d’une histoire à laquelle toute l’Europe – et un bout d’Afrique – s’est préparée depuis des mois. Toute, si ce n’est cette bande d’irréductibles soldats jaune et noir, les mêmes qui ont terrassé le Leinster lors des deux dernières campagnes européennes. « ROG » le premier, sait ses hommes capables de rééditer cette performance. Peut-être même n’ont-ils jamais été autant armés. Ce collectif ne possède-t-il pas le meilleur double trio de première ligne d’Europe ?

Will Skelton n’est-il pas, dans ses grands jours, le numéro 5 le plus terrifiant de la planète ovale ? Levani Botia, joueur inclassable, n’est-il pas le facteur X ultime ? Extraterrestre mis à part, Tawera Kerr-Barlow n’est-il pas le meilleur numéro 9 au monde ? Et Antoine Hastoy n’aurait-il pas déjà quelques dizaines de sélections en Bleu s’il était né à une autre époque pas si lointaine ? Quant aux lignes arrière maritimes, n’ont-elles pas rassuré tout le monde sur leurs qualités en contribuant largement à établir le record de points jamais inscrits en demi-finale de l’épreuve (47, excusez du peu…) ? Enfin, au milieu de tout ça, Grégory Alldritt n’est-il pas le meneur de troupes et le fer de lance rêvé de toute équipe ? Son manager le voit ainsi. Et même plus encore : « Greg a changé depuis deux ans. Il comprend maintenant l’importance de bien se préparer, alors qu’avant, il pensait qu’il était indestructible. Grâce à lui, la mentalité du club a changé. Il n’est pas intéressé par le fait de jouer mais de gagner. »

« C’est difficile de vraiment se préparer à ça… »

Tout cela pour dire quoi ? Que tout simplement le Stade rochelais pourra s’avancer tête haute sur la pelouse de l’Aviva Stadium et regarder son adversaire dans le blanc des yeux. Favori, le Leinster ? On veut bien le concéder. Mais après tout, qui est invaincu depuis 24 mois sur la scène européenne ? Et qui est le tenant du titre jusqu’à ce samedi, 17 h 45 ? « On parle tout le temps d’étouffer ou d’arrêter le Leinster mais qui va arrêter La Rochelle ? C’est un sujet aussi, replace le meilleur joueur européen des quinze premières années. Cette perception des choses est déterminante aussi. C’est important d’arriver à Dublin et que ce soit du 50-50 pour le gain du match. » 

Les bookmakers ne pensent pas la même chose, eux dont les cotes donnent, grosso modo, 1,3 vs 3,5 contre 1 ? C’était déjà le cas l’an dernier avant que la majeure partie des pronostiqueurs ne soit désavouée par Grégory Alldritt et compagnie. Les succès passés ne garantissent rien mais ils viennent rappeler que la prétendue logique et les supposées supériorités ne sont plus que des a priori une fois le coup d’envoi donné.

Pour vaincre une troisième fois de suite le ténor irlandais, les Maritimes devront plus que jamais approcher la perfection. Autrement dit : optimiser leurs temps forts et résister du mieux qu’ils peuvent sur ceux du camp d’en face. Et puis tout le reste, aussi : gagner la bataille des rucks, être irréprochables en conquête, avisés sur le plan tactique… Antoine Hastoy résume l’équation en peu de mots : « Il faudra sortir la meilleure prestation de la saison pour l’emporter. » De la saison, voire même plus. À cette fin, « ROG »  et ses boys de l’encadrement ont concocté une stratégie que l’on imagine volontiers diabolique : « Le plan est organisé, il est clair. Il faut maintenant voir si l’on arrive à le mettre en place dans une ambiance hostile. J’ai des joueurs hyper motivés, qui ont très faim. On sait que ça va être très dur mais c’est possible. » Grégory Alldritt et ses partenaires devront avant tout dominer les démons qui peuvent vous terrasser avant même le coup d’envoi : « Il sera crucial de gérer le stress dans une enceinte où il y aura beaucoup d’adversité. Ce sera un grand test. C’est difficile de vraiment se préparer à ça… » 

Et pourtant, il le faut : « Les discours, l’approche mentale, c’est hyper important et ça commence bien avant le jour du match, prolonge O’Gara. Comment le coach organise les choses, ce qu’il choisit comme mot, ce qu’il insuffle comme mentalité : tout ça peut faire la différence. Nous avons tout fait pour renforcer les joueurs sur le plan mental, gérer la pression, travailler la capacité à rester dans le match malgré les fautes, pendant les temps faibles… » Les Toulousains l’ont récemment rappelé, quoi qu’ait pu en dire le score finale de leur demie (41-22) : ce Leinster n’est pas intouchable, rugbystiquement parlant. À la seule condition de ne pas se mettre en position de faiblesse : "On sera obligé de rester à quinze, sinon on sait qu’ils exploiteront toutes les failles", avertit Antoine Hastoy. Pierre Bourgarit suit : "Regardez donc, Toulouse a pris deux cartons et encaissé 25 points…"

En attendant le premier impact, tout va pour le mieux côté maritime : l’effectif, densifié, affiche presque complet et la dynamique est plus que favorable (avec dix victoires d’affilée avant le déplacement sans enjeu à Montpellier). Ça pourrait aller difficilement mieux, sur le papier : « Le groupe a de la fraîcheur, il est en confiance, il grandit beaucoup ces derniers temps", souligne l’ouvreur. "Les joueurs sont meilleurs, le groupe est meilleur, appuie son manager. Et on ne peut pas mentir, la victoire de l’an passé nous a apporté de l’expérience. On est en train, je l’espère, de créer un super club. » Un statut que la bande à Cullen a acquis depuis tant d’années. Mais il ne peut y avoir qu’un seul roi sur le trône. Samedi soir, soit le Leinster aura rejoint Toulouse au panthéon du rugby européen avec une cinquième étoile soit La Rochelle aura signé ce qu’il conviendrait de considérer comme la plus remarquable performance jamais accomplie en finale de l’épreuve. Quoi qu’il arrive, une grande page d’histoire va s’écrire au 4 Landsdowne Road. Et le rugby en ressortira grandi.

« On parle tout le temps d’étouffer ou d’arrêter le Leinster mais qui va arrêter La Rochelle ? C’est un sujet aussi. Cette perception des choses est déterminante aussi. C’est important d’arriver à Dublin et que ce soit du 50-50. »

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