Laporte-Galthié, un couple dans la tempête ministérielle

Ce n’est évidemment pas par plaisir que ces pages ne sont pas consacrées à la perspective du dixième grand chelem du rugby français, ni au retour des Bleus à la 3e place du classement World Rugby pour la première fois depuis dix ans. Mais à qui la faute, si on ne peut pas parler de rugby, au lendemain de ce qui aurait dû être un dimanche de France-Écosse ?

C’est précisément ce que la ministre des Sports Roxana Maracineanu a demandé à éclaircir, plaçant par la même occasion le couple le plus emblématique du rugby français sous le feu des projecteurs. Car oui, qu’on le veuille ou non, les destins de Bernard Laporte (nommément placé devant ses responsabilisés par la ministre) et Fabien Galthié (suspecté d’avoir brisé les règles de la bulle sanitaire) sont plus que jamais liés.

Après avoir été le capitaine de Bernard Laporte lors de son premier mandat de sélectionneur, après lui avoir succédé comme entraîneur du côté du Stade français ou de Toulon, Fabien Galthié avait été le premier à sceller ce pacte aux prémices de la dernière campagne pour la présidence de la FFR, déclarant à quelques jours du scrutin que « si jamais la question d’une victoire de l’opposition devait se poser après les élections, je réfléchirai à ma décision le moment venu. Depuis 20 ans, mon destin est lié à celui de Bernard, c’est un fait. Un lien très fort existe entre nous. Il m’a fait confiance pour remettre l’équipe de France sur le bon chemin. Il m’a nommé pour cela. La question ne se pose pas aujourd’hui, elle pourrait se poser après les élections ».

Menaces sur les joueurs et clash sur RMC

De fait, si la fameuse question ne s’est jamais posée, le lien entre les deux hommes en a clairement été renforcé. Il n’est ainsi pas un hasard si le président de la FFR a choisi l’antenne de son ami d’enfance, Vincent Moscato, pour monter au front  à la défense de son sélectionneur. Et d’arguer avec un brin de mauvaise foi que si Emmanuel Macron ou Donald Trump avaient pu être touchés, le staff du XV de France pouvait l’être lui aussi.

De quoi générer un malaise palpable, amplifié par le clash avec le consultant éric Di Meco, au point que le président de la FFR s’est emmêlé les pinceaux à plusieurs reprises, confondant manifestement les principes d’une bulle sanitaire et de respect des gestes barrières. À moins que cette confusion et ces légèretés soient la source de tous les problèmes…

Reste qu’au sujet de son sélectionneur, Laporte n’a pas cédé le moindre pouce de terrain. « Je ne sais pas s’il est sorti ou non, plaidait-il. Est-ce qu’il a enfreint les règles ? Sur ce qu’on me dit, non. Je lui ai posé la question, il m’a dit non et j’ai confiance en lui. […] Si le rapport dit que des gens ont failli, il faudra prendre des sanctions, c’est une évidence, je suis quelqu’un de pragmatique. S’il y a des fautes, on assumera. Mais Galthié est-il menacé en l’état ? Bien sûr que non. » 

Parce que la théorie d’une contagion par l’équipe de France à 7 tient de nouveau la route depuis qu’elle se trouve défendue par le ponte de la Pitié-Salpêtrière, éric Caumes, quand bien même le vice-président de la fédé, Serge Simon, avait assuré du contraire lundi dernier dans Midol. 

Parce que le fait que Fabien Galthié ait probablement brisé la bulle sanitaire ne fait pas forcément de lui le fameux patient 0. Surtout, parce que l’équipe de France séduit et gagne sous son mandat. Et c’est évidemment tout ce qui importe au président Laporte en vue du Mondial 2023… « Fabien fera la Coupe du monde 2023, a ainsi assené le patron de la FFR aux Bleus dans le huis clos intimidant de Marcoussis. Vous, s’il continue à y avoir des fuites dans la presse, je ne sais pas. » La menace n’est même plus voilée.

La crainte d’une dynamique sportive brisée

Voilà pourquoi, plus que d’un rapport dont il ne semble pas avoir à redouter grand-chose, le couple Laporte-Galthié aura fort à craindre des prochaines échéances sportives des Bleus. On peut estimer que le tandem aurait de fortes chances d’exploser si la dynamique du XV de France crevait, juste après la bulle sanitaire.

On peut aussi penser les deux hommes pourraient ressortir encore plus soudés d’avoir traversé ensemble cette zone de turbulences. De quoi transformer les prochaines semaines en échéances vraiment cruciales, à commencer par un certain déplacement à Twickenham, le 14 mars,  face à une équipe anglaise en pleine crise sportive…